
À la fin décembre 2014, les Nations Unies ont organisé la dernière réunion préparatoire à la Conférence de Paris sur le Changement climatique. Durant ce sommet, il a été fait référence à plusieurs reprises à la forêt amazonienne, le Tribunal d’opinion sur les droits de la Nature qui s’est tenu en marge de la réunion onusienne a également abordé le sujet.
Le problème climatique est assez simple. Alors que les activités humaines produisent de plus en plus de gaz à effet de serre, on assiste à la destruction progressive des puits de carbone, ces réserves naturelles qui absorbent ces gaz : les forêts et les océans. Le résultat est que la planète ne parvient plus à se régénérer complètement. Il faudrait à cet effet une planète et demi et malheureusement, nous n’en disposons que d’une.
Trois grandes régions du monde abritent des réserves forestières jouant un rôle clé dans la régulation des écosystèmes régionaux : l’Asie du sud-est (Malaisie et Indonésie), l’Afrique centrale (Congo) et l’Amazonie. La première a quasiment déjà disparu : la Malaisie et l’Indonésie ont détruit plus de 80% de leurs forêts originelles pour planter des palmiers à huile et de l’eucalyptus. Au Congo, la guerre avait mis un terme à l’exploitation forestière et à l’extraction minière, mais ces activités ont repris au cours des 10 dernières années. L’Amazonie, quant à elle, se trouve en plein processus de dégradation. Le pape François, qui prépare une encyclique sur les questions climatiques, parle de la destruction des forêts tropicales comme un péché.
Les fonctions géologiques de la forêt amazonienne (...)
Avec 4 000 000 de km2 dans neuf pays, la forêt amazonienne stocke un total de 109 660 millions de tonnes de CO2 |1|, ce qui représente 50% de la capacité des forêts tropicales du monde |2|. Un total de 33 millions de personnes vit dans cette région, parmi lesquelles on dénombre 400 peuples autochtones.
Une étude réalisée par un chercheur brésilien, Antonio Donato Nobre, O futuro Climatico da Amazõnia - Relatorio Avaliação cientifica, décrit de manière impressionnante les fonctions de la forêt amazonienne |3| Il a rassemblé plusieurs études scientifiques menées au Brésil. Il rappelle tout d’abord que l’histoire géologique de l’Amazonie est très ancienne. Il a fallu des dizaines de millions d’années pour que se constituent les bases de la biodiversité de la forêt, ce qui lui a permis de devenir "un instrument de régulation environnemental" d’une grande complexité. Il s’agit d’un « océan vert » en complémentarité avec l’océan gazeux de l’atmosphère (eau, gaz, énergie) et l’océan bleu des mers, fait remarquer l’auteur.
Les fonctions principales sont au nombre de cinq. Tout d’abord, la forêt retient l’humidité dans l’air, permettant aux précipitations d’atteindre des endroits éloignés des océans, grâce à la transpiration des arbres. Deuxièmement, les pluies abondantes contribuent à préserver la pureté de l’air. Troisièmement, la forêt permet de conserver un cycle hydrologique positif, même dans des circonstances défavorables parce qu’elle aspire l’air humide des océans vers l’intérieur des terres, assurant des précipitations en toutes circonstances. La quatrième fonction est l’exportation de l’eau par les rivières sur de longues distances, empêchant toute désertification, en particulier à l’est de la Cordillère des Andes. Enfin, elle permet d’éviter les phénomènes météorologiques extrêmes grâce à la densité de la forêt, qui empêche l’apparition de tempêtes alimentées par la vapeur d’eau. C’est pour cela que l’on doit défendre cette richesse naturelle exceptionnelle.
La dégradation de la forêt
Les effets de la dégradation actuelle de la forêt amazonienne sont déjà visibles (...)
On estime qu’une réduction de 40% de la forêt signifierait le début d’une transition vers un état de savane. Actuellement 20% ont été détruits et 20% sont gravement menacés. Selon un communiqué de la FAO publié lors de la Journée internationale de la Forêt de mars 2014, si l’évolution reste semblable, dans 40 ans, il n’y aura plus de forêt amazonienne, mais une savane parsemée de quelques bois. Pour cette raison, l’auteur de l’étude appelle à un changement radical, considérant cependant que la partie n’est pas encore perdue. Il propose une restauration de la forêt détruite, la diffusion d’information pour sensibiliser l’opinion publique et des décisions des dirigeants politiques.
Mais, en fait, que constatons-nous ? Tous les pays qui ont sur leur territoire une partie de la forêt amazonienne, ont de « bonnes raisons » pour l’exploiter. Dans les pays néo-libéraux, il s’agit d’utiliser les ressources naturelles pour contribuer à l’accumulation du capital. Dans les pays « progressistes », les arguments sont différents : ils ont besoin d’extraire des ressources naturelles et de promouvoir les exportations agricoles pour financer les politiques sociales et dans les pays sociaux-démocrates, on observe un mélange de ces deux discours. Mais, quel que soit le discours, le résultat est le même. (...)