
Il y a les faits, et leur traitement. Mais devant le choc que représente l’attentat meurtrier perpétré à la rédaction de Charlie Hebdo, le silence s’impose dans un premier temps. C’est un mouvement de recul, traduisant l’effroi mêlé à l’horreur. Un acte sidérant qui sera qualifié de tous les noms possibles, tentant de restituer l’impression d’impuissance et d’écœurement.
Selon les bilans évoqués dans la presse, on parle de 12 personnes tuées au siège de la rédaction, alors que l’événement prend une portée internationale. Jean-Claude Juncker, président de la commission européenne, Barack Obama depuis la Maison Blanche, ou encore Madrid, Londres, Rome et Berlin dénoncent les événements tragiques. Mais tragédie, est-ce suffisant ?
Parmi les victimes, parmi les morts, des personnalités qui ont occupé le devant de la presse depuis des dizaines d’années. On parle de Wolinski, de Cabu, de Charb, figures emblématiques, mais dans un autre message, l’information est infirmée. En réalité, on voudrait l’immédiateté du compte-rendu, son intégralité, pour savoir, ne plus rafraîchir les pages Twitter, les directs des sites d’infos, les chaînes continues.
Sauf que les informations arrivent au compte-gouttes, réduisant au silence les voix de dessinateurs qui avaient su s’emparer de l’actualité, tourner en dérision les extrémismes, les torpiller, parce que la liberté de la presse devait être plus forte.
C’est justement avec des kalachnikovs et un lance-roquette que les assassins ont sévi. Difficile de parler de légitime défense de leur part. Impensable de légitimer quoi que ce soit de ce qui a eu lieu. Face au drame, face aux sourcils froncés qui tentent de comprendre, un message sur Twitter. Blanc sur noir, et tout se barre.
Seule certitude, les rédactions françaises vont bénéficier d’une surveillance policière accrue. Et le plan Vigipirate passe la barre de l’alerte attentat. Et comme les meurtriers ont évoqué Al-Qaïda, la psychose va se resserrer, revenir sur les plateaux, Éric Zemmour refera des entretiens, le livre de Houellebecq profitera malgré lui de ce drame. Cela dit, il semblerait que même les éditions Flammarion profitent de ce dispositif de sécurité. Preuve que la sortie du livre Soumission ne laisse pas de marbre.
Tout cela est irréel, surréaliste. Probablement pas indicible, les mots se trouvent. Depuis des années, Charlie faisait l’objet de menaces, de surveillance policière, pour assurer la sécurité de ses journalistes, des dessinateurs. (...)
T’as raison, Charb, la peur ne se maîtrise pas. Et si cela peut servir, la rédaction de ActuaLitté est pleinement solidaire, avec trouillomètre à zéro face à ce qui vient de se produire. Un rasemblement est prévu Place de la République, à Paris, à 19 heures.