
Les électeurs chiliens se sont largement prononcés en faveur d’une réécriture de la Constitution, selon des résultats quasi définitifs communiqués dimanche par la Commission électorale.
(...) Selon des résultats quasi définitifs portant sur plus de 99 % des bureaux de vote, les suffrages favorables à une nouvelle Constitution l’emportaient largement avec 78,28 % des voix, contre 21,72 % pour le vote rejetant cette option. La participation s’élève à environ 50 %, selon l’autorité électorale. Le futur projet de Constitution sera soumis à référendum en 2022.
Réagissant à ces résultats, le président conservateur Sebastian Piñera a appelé dans une allocution télévisée à "l’unité" du pays pour rédiger la "nouvelle Constitution". "Jusqu’à présent, la Constitution nous a divisés. À partir d’aujourd’hui, nous devons tous collaborer pour que la nouvelle Constitution soit un espace d’unité, de stabilité et d’avenir", a déclaré le chef de l’État. (...)
Des dizaines de milliers de manifestants euphoriques se sont rassemblés sur plusieurs places de la capitale Santiago, dont la Plaza Italia, épicentre de la contestation, pour fêter la victoire, ont constaté des journalistes de l’AFP. (...)
Il y a un an jour pour jour, la contestation contre les inégalités avait connu un tournant lorsque 1,2 million de personnes s’étaient rassemblées sur cette place emblématique, rebaptisée "Place de la dignité".
"Je n’ai jamais imaginé que nous, Chiliens, serions capables de nous unir pour un tel changement !", s’enflammait Maria Isabel Nuñez, 46 ans, venue sur la place main dans la main avec sa fille de 20 ans. (...)
Remplacer la Constitution héritée de la dictature d’Augusto Pinochet (1973-1990) était une des revendications des manifestations lancées à partir du 18 octobre 2019 afin de réclamer une société plus juste.
La loi fondamentale actuelle limite fortement l’action de l’État et promeut l’activité privée dans tous les secteurs, notamment l’éducation, la santé et les retraites. (...)
Selon des résultats portant sur la quasi totalité des bureaux de vote, l’option d’une "Convention constituante" uniquement formée de citoyens l’emporte par 79 % des voix, contre 21 % pour une "Convention mixte" composée de citoyens et de parlementaires. (...)
Jusqu’à ce jour, aucune tentative de remplacement de la loi fondamentale n’a abouti. Les constitutionnalistes s’accordent à dire que le texte a été rédigé de sorte que les franges conservatrices de la société puissent se maintenir au pouvoir, y compris après la fin de la dictature. (...)
La victoire de l’"Apruebo" signifie "l’abandon une fois pour toutes de l’ombre de la dictature dans le domaine institutionnel", a expliqué à l’AFP Marcelo Mella, un politologue de l’Université de Santiago.
Pour lui, le choix des Chiliens de s’en remettre à une Convention constituante citoyenne pour rédiger la future Constitution représente "le triomphe du peuple pour le peuple dans une démocratie (...) qui, depuis trois décennies, s’est construite sur un discours de stabilité au prix d’un retrait de la souveraineté au peuple".
Jusqu’à l’éclatement de la crise, le Chili était considéré comme un des pays les plus stables d’Amérique latine, encensé pour ses résultats macro-économiques. Déclenchée par une hausse du prix du ticket de métro à Santiago, la contestation a été nourrie par la colère de la population dénonçant la déconnexion des élites face au quotidien difficile du plus grand nombre et a pris de court l’ensemble de la classe politique.