
Le 14 janvier dernier, Obama a annoncé un programme de réduction de 40 % des émissions de méthane des Etats-Unis d’ici 2025. Un pavé dans la mare qui projette sur le devant de la scène le rôle de ce puissant gaz à effet de serre. Mais en France et en Europe, les gouvernements font l’autruche.
Pourtant, au fil des rapports successifs du GIEC l’importance de ce gaz n’a cessé de s’affirmer. C’est ainsi que dans son rapport de 2013 le GIEC rend le méthane (et les gaz qui découlent de sa présence dans l’atmosphère) responsable à 33 % [1] du forçage radiatif (le flux de chaleur supplémentaire) que l’activité humaine a engendré depuis le début de l’ère industrielle jusqu’à aujourd’hui, derrière le gaz carbonique (56 %).
De même, la valeur du pouvoir de réchauffement global (PRG) d’une émission ponctuelle de méthane à horizon de cent ans [2] proposée par le GIEC est passée en moins de vingt ans de 21 à 34 (et à horizon de vingt ans de 72 à 86). [3]
Silence radio en France et en Europe
Si aux Etats-Unis, les pouvoirs publics ont pris le risque de cette initiative qui met vent debout un lobby pétrolier et gazier montré du doigt comme responsable d’une part rapidement grandissante des émissions de ce gaz du fait de sa frénésie de forages de pétrole et gaz de schiste, c’est qu’il y a urgence. (...)
Au rythme actuel, les émissions de méthane aux Etats-Unis pourraient augmenter de 25 % d’ici 2025, de quoi ruiner d’avance les efforts de réduction drastique des émissions de gaz carbonique que le gouvernement des Etats-Unis a déjà bien du mal à amorcer…
En Europe et en France, rien de tout cela aujourd’hui. L’omerta sur le méthane se maintient comme si des intérêts puissants s’y employaient. Pas un mot par exemple du méthane dans la loi sur la transition énergétique française, alors que les émissions de CH4 liées au secteur énergétique (émissions fugitives et déchets organiques) comptent pour plus de 40 % des émissions.
Rien dans le « paquet climat » de la commission de Bruxelles , malgré la mise en garde du parlement européen [4] de février 2014 qui souligne « qu’il n’a pas suffisamment été tenu compte de l’incidence du méthane (CH4) sur le réchauffement climatique compte tenu du fait que son potentiel de réchauffement de la planète (PRP) est 80 fois supérieur à celui du CO2 sur une période de quinze ans, et 49 fois, sur une période de quarante ans », et invite la Commission « à mieux analyser l’incidence du méthane en lien avec les politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre, à évaluer les possibilités et à proposer un plan de réduction des émissions de CH4 adapté aux différentes situations de certains secteurs et États membres ». (...)
depuis vingt ans, à force de regarder à cent ans devant soi, on est insidieusement passé de l’horizon 2095 à l’horizon 2115, alors que pendant ce même temps l’horizon des ennuis annoncés s’est rapproché de 2100 vers 2050 ou 2060.
C’est bien ce que signale le dernier rapport de la banque mondiale en prévoyant une élévation de la température du globe de deux degrés autour de 2050 si la politique climatique mondiale « business as usual » que nous connaissons depuis vingt ans se poursuit…
(...)
Au moment où la France se prépare à accueillir à Paris une prochaine conférence des parties à la conférence sur le climat qui est présentée à juste titre comme celle de la dernière chance, notre pays s’honorerait en prenant l’initiative d’un programme ambitieux de réduction de ses propres émissions de méthane.
Et en proposant dans les plus brefs délais à ses partenaires européens la définition d’un programme concerté de réduction d’une ampleur comparable à celle que propose le président des Etats-Unis aujourd’hui.