
"Mon jouet, c’était une arme", se souvient un jeune Colombien recruté à huit ans par la guérilla de l’ELN dont il s’est échappé en 2016, après l’exécution de son frère et la mort au combat de sa petite amie.
A 18 ans aujourd’hui, il préfère ne pas révéler son identité. Mais il ne craint pas de monter sur les planches pour "Victus", pièce de théâtre présentée à Bogota dans laquelle jouent d’anciens guérilleros, paramilitaires, soldats et des victimes du conflit armé qui mine ce pays depuis plus d’un demi-siècle.
"C’est impressionnant de partager avec des gens avec lesquels nous nous entretuions avant. Si ce groupe peut se réconcilier, pourquoi le pays n’en serait-il pas capable ? Cela ne dépend que de nous !", a-t-il déclaré à l’AFP.
"Vivre comme on ne l’a pas choisi, c’est très dur", a-t-il ajouté, se remémorant ses années dans l’Armée de libération nationale (ELN, guévariste), la dernière guérilla active de Colombie, qui a entamé le 7 février des pourparlers de paix avec le gouvernement.
’Bienvenus à l’ELN !’
"Je suis de Tame, dans l’Arauca (est), une zone rouge. J’ai été recruté à huit ans. Ils m’ont enlevé de mon école, à la campagne. Les +types+ sont arrivés en 4x4, ont tiré des coups de feu en l’air et embarqué 15 enfants ainsi que deux instituteurs. (...)
Ils nous ont fait grimper dans le véhicule. Quand il s’est arrêté, nous étions en pleine jungle. Nous n’étions que des mômes de huit, neuf, dix ans. Ils nous ont laissé attachés.
Le lendemain, ils nous ont réveillé d’un seau d’eau : +Debout déchets ! Bienvenus à l’ELN ! Recrues, vous faites partie du front Domingo Lain de l’ELN+, ont-ils lancé, avant d’abattre nos instituteurs devant nous.
Au bout d’un an, j’ai été convoqué : +Ton nouveau nom est Camilo+. Et là, ils m’ont donné fusil, uniforme et équipement." (...)