
Comme le souligne Eleni Varikas dans une belle préface, il y a un double paradoxe à « réunir ensemble ce que le sens commun et les normes sociales séparent : l’homosexualité, perçue socialement comme une transgression de l’ordre du genre, et la maternité, un des plus importants piliers de cet ordre et de la hiérarchie des sexes et des sexualités dont elle devient le support ». Ce travail sur la famille ou la parenté « par un angle inattendu » permet une appréhension du couple « en absence de la fameuse « différence des sexes » – ce qui ne veut pas dire forcément en l’absence de domination masculine
étudier l’homosexualité dans une autre perspective que celle des pratiques sexuelles et de la santé qui tend à identifier la population homosexuelle comme d’abord, et avant tout, « sexuelle » ; accéder enfin à la norme dominante, l’hétéronormativité, du point de vue de ce qui est son revers, son dehors constitutif, éclairant, ainsi, dans un même geste, la matérialité d’un statut stigmatisé et les contradictions et incohérences occultées par évidence de la maternité comme norme. »
Il s’agit d’un véritable travail de dénaturalisation de la maternité, par interrogations, compréhensions et interprétations, par des entretiens en profondeur, des « pratiques des actrices, leurs motivations, le sens social qui est attribué à ces pratiques par elles-mêmes, par les autres ».
Virginie Descoutures analyse les notions et concept (parentalité, homoparentalité, famille monoparentale, couple parental ou travail parental) et restitue leur historicité. Elle réfléchit sur les multiples niveaux d’invisibilité induits par les désignations ou leur absence. (...)
Ce livre permet de mettre à jour les « présupposés devenus évidences de la maternité normale », c’est à dire fondée sur l’hétérosexualité. Il nous rappelle aussi que les liens conjugaux et filiaux sont nécessairement construits, et qu’il est possible de les construire autrement que dans un cadre hétéronorminatif. En étant/agissant, les mères lesbiennes participent à « une redéfinition des possibles » et leurs enfants ont besoin d’être « comme tous les enfants reconnus et protégés par les règles de la filiation qui définissent les droits et les devoirs parentaux ».