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Comme les nazis, l’Arabie saoudite se sert d’un « plan de la faim » au Yémen
Article mis en ligne le 17 septembre 2019

Le mois dernier, l’Arabie saoudite a élargi son répertoire de pitreries en accordant la citoyenneté à un robot appelé Sophia, une initiative censée renforcer le vernis de modernité et de progrès que les autorités saoudiennes tentent de maintenir.

Dans une interview récente accordée au Khaleej Times, un journal émirati, Sophia a spéculé qu’« il serait peut-être possible de rendre [les robots] plus éthiques que les humains » et qu’il n’y avait que deux options pour l’avenir : « Soit la créativité abondera et des machines seront inventées pour évoluer vers la superintelligence transcendantale[,] soit la civilisation s’effondrera. »

Il est vrai que de nombreux occupants de la planète sont actuellement aux prises avec des problèmes beaucoup plus banals, comme par exemple survivre sous les bombardements et le blocus dirigés par l’Arabie saoudite dans le Yémen voisin. Les habitants de ce pays pourraient être pardonnés de supposer que la civilisation s’est déjà effondrée.
Une famine imminente

Oubliez l’abondance de créativité : à la place, les Saoudiens et leurs complices ont semé la destruction au Yémen, en plus de présider à une famine imminente. Les Émirats arabes unis, un territoire qui cherche à dissimuler sa nature brutale derrière un développement moderne de façade, des bâtiments tape-à-l’œil et des centres commerciaux avec piste de ski, contribuent grandement à l’effort de guerre.

D’autres contributions belliqueuses sont venues de plus loin. Le magazine The New Yorker note que « les forces armées saoudiennes, soutenues par plus de 40 milliards de dollars d’expéditions d’armes américaines autorisées par les administrations Trump et Obama, ont tué des milliers de civils au cours de frappes aériennes » au Yémen.

Naturellement, les États-Unis sont également responsables d’une sauvagerie bricolée à grande échelle, notamment des attaques de drones contre des festivités de mariage au Yémen. (...)

Le « plan de la faim » nazi

Lors de périodes de guerre plus récentes, la faim a également été brandie comme une arme. Dans un essai publié en juin 2017 dans la London Review of Books intitulé « Les nazis l’ont utilisée, nous l’utilisons », Alex de Waal considère le recours à la famine comme étant un « instrument efficace de meurtre de masse » durant la Seconde Guerre mondiale. Alors que la « famine forcée » était bien entendu « un des instruments de l’Holocauste », les nazis avaient également élaboré un « plan de la faim » pour certaines parties de l’Union soviétique, conformément aux desseins agricoles et territoriaux allemands.

(Fait intéressant, le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane aime également évoquer des nazis de temps à autre – comme lorsqu’il a déclaré à Thomas Friedman, chroniqueur spécialiste des affaires étrangères pour le New York Times et société de relations publiques de l’Arabie saoudite à lui tout seul, que le dirigeant suprême iranien Ali Khamenei était « le nouvel Hitler du Moyen-Orient », et qu’il ne souhaitait pas « que le nouvel Hitler de l’Iran refasse au Moyen-Orient ce qui s’est passé en Europe ».)

Cependant, les nazis ne sont pas les seuls à avoir profité de la famine au XXe siècle. (...)

Quant aux exemples contemporains de privations des moyens de survie infligées aux populations civiles, les sanctions imposées par l’ONU à l’Irak au début des années 1990 nous viennent à l’esprit, tout comme la réponse apportée en 1996 par Madeleine Albright, alors ambassadrice américaine à l’ONU, aux estimations selon lesquelles un demi-million d’enfants irakiens avaient perdu la vie à cause de ces sanctions : « Nous pensons que le prix en vaut la peine. »

Tout le monde n’était pas d’accord, comme l’a montré un article paru dans le New York Times en décembre 1995 au sujet d’un rapport rédigé par deux scientifiques basés aux États-Unis pour le compte de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture. (...)

L’article du Times cite les auteurs du rapport : « La branche humanitaire des Nations unies fournit des palliatifs pour soulager les souffrances alors que le Conseil de sécurité de l’ONU a l’intention de prolonger les sanctions. »
Le journalisme transformé en arm (...)

Heureusement pour l’Arabie saoudite et compagnie, la complicité des États-Unis dans des entreprises criminelles est à peu près assurée tant que les recettes pétrolières saoudiennes – sans parler des contributions au chaos régional – continueront de se traduire par de grosses sommes d’argent à destination de l’industrie américaine de l’armement.

Dans le même temps, l’establishment politique américain est assisté par des médias obséquieux qui aiment à dépeindre les membres de la famille royale saoudienne comme des pionniers innovateurs et réformateurs. (...)

Malheureusement, le journalisme militarisé ne semble pas être passé de mode. Et tandis que le Yémen se prépare à une famine du XXIe siècle, la famine éthique sévit, elle aussi. (...)