
Dans L’Humanité de samedi 5 février 2011, un tête-à-tête intéressant sur « Matières premières agricoles : interdire la spéculation ? » oppose Patrick Artus et Aurélie Trouvé. Le premier affirme que « les marchés à terme offrent une assurance sur les prix » tandis que pour la seconde « il faut désarmer les marchés à terme ».
Patrick Artus est trop instruit pour croire un instant ce qu’il raconte. Mais il a peut-être tellement la nostalgie de l’efficience des marchés qu’il tente de nous (se) persuader qu’on peut, malgré la crise financière, encore accorder quelque crédit (crédit, oui !) à une telle foi. (...)
Les uns parient à la hausse du prix jusqu’au terme du contrat, les autres parient à la baisse. Et c’est justement dans cette suite sans fin que vont s’immiscer les opérateurs dont la fonction n’est pas de produire de la farine avec le blé servant de sous-jacent au produit dérivé, mais dont le métier est de faire du « blé » avec la farine. Il n’y a pas de marché à terme sans spéculation, c’est tautologique. (...)
En cette période de crise de l’Union européenne, vouloir une politique agricole dont les marchés à terme seraient la boussole ne peut qu’accroître la volatilité des cours et accentuer la dérive productiviste de l’agriculture industrielle.
Car, n’en doutons pas, derrière les fonds spéculatifs qui font du blé avec la farine, il y aura aussi des Frankenstein pour inventer des OGM. Mais y a-t-il un assureur sur les marchés à terme pour assurer contre les risques génétiquement modifiés ?