
Le Forum des peuples était organisé par une série de mouvements sociaux, de groupes en lutte contre les projets de l’ADB (et d’autres institutions financières internationales) et de syndicats, en particulier l’Indian Social Action Forum (INSAF) qui regroupe plus de 700 organisations non gouvernementales, organisations de terrain et mouvements sociaux.
Derrière le slogan « ADB Quit India !, ADB quit Asia ! », le People’s Forum voulait dénoncer les politiques néolibérales des institutions financières internationales et en particulier de la Banque asiatique du développement (BAD) et mettre en lumière les ravages causés par ces politiques.
Au nom de l’éradication de la pauvreté et du développement, la Banque asiatique du développement soutient une croissance économique basée sur des méga projets d’infrastructure, des zones spéciales économiques, des expansions urbaines, des zones industrielles, une agriculture intensive tournée vers l’exportation. Tous ses projets sont grands ouverts aux investissements privés. Au plan social, les résultats sont sans appels. L’éradication de la pauvreté et le développement des pays d’Asie ne sont que des alibis qui masquent une réalité bien plus crue : l’accaparement des biens communs et des ressources naturelles par des compagnies privées, une accumulation sans précédent des richesses dans les mains d’une minorité. Les politiques néolibérales sponsorisées par les institutions financières ont, en Asie comme ailleurs, renforcé considérablement les inégalités. Les riches sont de plus en plus riches et les pauvres sont de plus en plus dépossédés et marginalisés. Derrière « l’émergence économique de l’Asie » se cache une pauvreté massive et la destitution pour la majorité.
Dans le domaine de l’eau, de l’accaparement des terres, du changement climatique, du nucléaire, sur les questions paysannes ou les conditions de travail, sur la question des pauvres en milieu urbain… les luttes et les résistances en Inde sont nombreuses et combattives. Mais elles restent en grande partie isolées et diffuses et n’ont pas une analyse globale de la situation. De plus, étant souvent dirigés par de grandes ONG, les mouvements restent fragmentés. Le People’s Front against the IFIs se donne l’ambitieuse vocation d’unir dans un front politique, les différents mouvements de résistance locaux, mouvements sociaux, syndicats et partis politiques qui combattent les IFIs. (...)
Sur place, le gouvernement s’était arrangé pour qu’il n’y ait pas de jonction avec la lutte des paysans de Greater Noida. Dépossédés de leurs terres pour construire cette immense ville nouvelle, les paysans de Greater Noida luttent depuis plusieurs années sans succès. Quelques jours avant l’ouverture du sommet, pour éviter une mobilisation paysanne, le gouvernement a prétendu accepter toutes leurs demandes. Elles ont finalement été rejetées à l’issue de la semaine, quand le meeting de l’ADB s’est terminé, ce qui a amené les paysans à manifester le 4 et 5 mai. (...)
Le forum s’est conclu par une séance spéciale sur la construction du People’s Front et son agenda pour l’année à venir. Une nouvelle réunion nationale devrait se tenir en octobre.
Il est à noter que le Forum des peuples a sérieusement attiré l’attention des pouvoirs publics et du gouvernement. Il y avait partout autour du centre un nombre très imposant de policiers qui empêchaient toute tentative de manifester près du meeting de l’ADB. De plus, deux représentants officiels du gouvernement ont tenté de suivre les débats de la dernière séance sur la construction du People’s Front. Ils se sont fait recevoir et virer de la salle… Ultime manœuvre, le ministère de l’Intérieur a gelé le compte bancaire de l’INSAF, prétendant que ses activités étaient « préjudiciables et contre l’intérêt public ». Une campagne de soutien de l’INSAF est en cours. (...)