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Diritti umani
Congo : cette misérable humanité dans la boue, pour la guerre du cobalt.
/Corriere della Sera
Article mis en ligne le 19 décembre 2021
dernière modification le 18 décembre 2021

Le pays, dix fois plus grand que l’Italie, possède le précieux minerai (piles électriques) mais est l’une des nations les plus pauvres du monde : où va cette richesse ? En Chine

Une rangée ordonnée de camions jaunes surplombant le gouffre d’une mine de cobalt : l’image semble avoir peu à voir avec le Congo grouillant et délabré qui reste le plus gravé dans notre mémoire, celui qui frappe les lecteurs et (pas toujours) le photoéditeur : les visages et des histoires de garçons creusant des tunnels avec leurs mains dans la terre rougeâtre, d’humanité à moitié nue avec des yeux grands ouverts qui se casse le dos du lever au coucher du soleil pour voler des miettes de métaux précieux africains dans le sous-sol et les placer dans les poches de patrons féroces et sangsues intermédiaires. Bien sûr, il y en a aussi (en fait ils sont majoritaires) dans le portrait collectif des mineurs de la (autoproclamée) République Démocratique du Congo (...)

Le deuxième pays le plus pauvre du monde

Les mineurs dits « artisanaux », qui creusent en bordure (ou en travers à l’intérieur des enceintes) des grandes mines, représentent numériquement l’essentiel de la catégorie. Pourtant, ces camions alignés au bord de la fouille représentent la vraie et principale richesse, celle qui pourrait contribuer au progrès des 90 millions d’habitants du deuxième pays le plus pauvre du monde, et qui continue au contraire de finir ailleurs (...)

Comme l’huile

Pour le Congo, le cobalt est sur le papier comme le pétrole pour l’Arabie saoudite. La plus grande part du trésor bleu national est extraite par des marques étrangères, de l’anglo-suisse Glencore aux différentes sociétés dirigées par China Molybdenum (CMOC), un géant (naturellement) étatique dont le siège est à Pékin. Comment fonctionnent ces entreprises ? Comment traitent-ils les travailleurs et les communautés locales ? Il y a un mois, alors que dans la ville bondée de Glasgow, le monde cherchait un moyen de désamorcer la mine du changement climatique, un rapport détaillé de 87 pages est sorti en catimini, rédigé par l’association britannique Raid (Droits et responsabilité dans le développement), qui, dans cinq mines du Congo, a mené une enquête de 28 mois avec plus de 130 entretiens sur le terrain. Le projet a été réalisé avec la collaboration du Centre d’Aide Juridico-Judiciaire, un centre congolais spécialisé dans le droit du travail. Le résultat de l’enquête est une photographie à combiner avec celle des camions jaunes au bord de la mine : exploitation, maltraitance, avarice salaire, racisme.

Les nouveaux colonisateurs

"Depuis que les Chinois sont arrivés", a déclaré un ouvrier, "nous sommes dans une situation pire qu’avant". Coups de pied, insultes, coups : « Ce sont les nouveaux colonisateurs » (...)

Téléphones sanglants

Le coltan de nos téléphones portables vient (aussi) du Kivu ensanglanté par mille conflits. Le royaume du cobalt se trouve au sud du Congo, loin de l’éternelle zone de guerre au nord-est du pays avec son épicentre Goma (où notre ambassadeur Luca Attanasio a été assassiné le 22 février dernier). Kolwezi est sa capitale poussiéreuse. La grande ville la plus proche est Lumumbashi, qui porte le nom du grand premier ministre réformateur Patrice Lubumba (tué en 1961 par des mercenaires belges au nom de l’ancien ami et futur dictateur Mobutu avec l’approbation de l’Occident). Que dirait Lumumba en visitant les mines à ciel ouvert de Kolvezi ? (...)

Le cobalt extrait dans la mine où Pierre travaille selon le Guardian aboutit en bout de chaîne d’approvisionnement dans les batteries au lithium qui vont recharger les véhicules des principaux constructeurs de voitures électriques (dont Tesla, VW, Volvo, Renault et Mercedes-Benz ).

Les firmes intermédiaires
Il est vrai que ces derniers temps, ces entreprises ont fait des efforts pour améliorer la situation (et retirer les mains des enfants de l’exploitation minière). Mais le nœud le plus problématique (ou si vous voulez la feuille de vigne) réside dans le fait qu’au moins 57% des travailleurs en question (selon le rapport Raid) sont embauchés par des entreprises intermédiaires, des sous-traitants. D’où la ligne de défense des Grands : ils sont responsables, qu’avons-nous à en faire si les conditions de travail pour extraire notre « cobalt certifié » sont inacceptables ? (...)