
Une expérimentation grandeur nature va sans doute commencer au Brésil : produire et lâcher des moustiques mâles génétiquement modifiés, dont la progéniture ne peut survivre. But du jeu : enrayer la reproduction de cette espèce transmettant le virus de la dengue, une maladie à l’état d’épidémie dans ce pays.
(...) Réalisée par la filiale brésilienne de l’entreprise britannique Oxitec, elle a une capacité actuelle de deux millions d’insectes par semaine, mais pourrait monter à dix millions. La prochaine étape sera un lâcher de moustiques dans les communes qui se sont déclarées intéressées, à commencer par Piracicaba. L’opération doit cependant obtenir l’aval de l’Anvisa, l’agence de surveillance sanitaire, et pourrait commencer en octobre prochain, époque propice à la reproduction de ce moustique, principal vecteur de la dengue. Le but, en effet, est de lutter contre l’épidémie qui sévit actuellement au Brésil et qui avait fait parler d’elle au moment de la Coupe du monde de football. Il n’y a pas eu de catastrophe sanitaire mais, une fois les joueurs et leurs supporters retournés chez eux, l’épidémie demeure. Entre 2000 et 2013, environ 7 millions de cas de cette maladie invalidante, parfois mortelle, ont été recensés, alors qu’il n’existe aucun vaccin ni aucun traitement.
L’entreprise Oxitec utilise un procédé mis au point à l’université d’Oxford en 2009 et expérimenté en plusieurs endroits, la première fois aux îles Caïmans, mais aussi en Malaisie. Un gène est introduit dans le moustique rendant l’insecte dépendant à la tétracycline, un antibiotique. Sans lui, l’insecte meurt. L’élevage est donc possible mais les moustiques ne survivent pas longtemps dans la nature. Seuls des mâles sont relâchés (la durée de maturation des larves différant pour les deux sexes, la séparation est facile). Ils sont destinés à s’accoupler avec les femelles rencontrées dans la nature. La progéniture, qui recevra ce gène, ne vivra pas. L’entreprise met en avant le succès des opérations déjà réalisées avec cette souche OX513A. (...)
L’association Inf’OGM souligne plusieurs points négatifs, à commencer par le manque de transparence de l’entreprise sur ses résultats. Selon l’association, l’élimination du moustique ne serait pas complète, car « 3 % des insectes survivent », ce qui ne permettrait pas d’enrayer l’épidémie. Par ailleurs, une autre espèce, Aedes albopictus (le moustique-tigre), transmet également la dengue et pourrait prendre la place d’A. aegypti si sa population venait à décliner. Si l’expérimentation a bien lieu, elle sera suivie avec attention…