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IRIN - nouvelles et analyses humanitaires
Crise humanitaire occultée en Turquie
Article mis en ligne le 6 février 2016

Alors que les combats s’intensifient dans la vieille ville de Sur, les autorités turques ont imposé un couvre-feu qui a forcé Neaz Tanlikulu, âgé de 75 ans, à quitter sa maison. Les étroites allées pavées où résonnaient les cris joyeux des parties de football de rue sont devenues le théâtre d’échauffourées meurtrières entre les forces de sécurité et la branche jeune du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), mouvement séparatiste interdit par l’État. (...)

Les combats dans le sud-est de la Turquie ont fait 200 000 déplacés en seulement deux mois, selon des organisations kurdes de défense des droits de l’homme, 93 000 selon les autorités turques. Quoi qu’il en soit, on peut parler de déplacement massif. Il n’existe aucun camp d’accueil, l’aide humanitaire est très limitée et les évènements sont pratiquement inconnus du reste du monde.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a dit qu’il maintiendrait ces mesures de répression jusqu’à ce qu’il n’y ait plus un seul activiste dans le sud-est. « Vous serez écrasés dans ces maisons, ces bâtiments, ces fossés que vous avez creusés, » a-t-il dit en décembre. « Nos forces de sécurité poursuivront le combat jusqu’à ce que [la région] soit totalement nettoyée et qu’une atmosphère paisible soit établie. »

Vieux conflit, nouvelles victimes (...)

Lundi, le Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme Zeid Ra’ad al-Hussein a attiré l’attention sur ce conflit en demandant une enquête sur des tirs dirigés par les forces de sécurité turques contre des civils apparemment non armés à Cizre, une autre ville à majorité kurde sous couvre-feu. Un évènement « extrêmement choquant » pour M. Al Hussein.

Ce conflit entre l’État turc et le PKK — considéré comme une organisation terroriste par la Turquie, par les États-Unis et par l’Union européenne — n’a pourtant rien de nouveau. La Turquie a mené une guerre civile pendant 30 ans contre les séparatistes, jusqu’à un cessez-le-feu historique décrété en 2013. De nombreux habitants de Sur sont des Kurdes déplacés par ce conflit.

Le processus de paix a été rompu en juillet dernier. (...)

Aide humanitaire insuffisante

Aucun camp n’ayant été mis sur pied pour les déplacés, la plupart des gens dépendent, comme Mme Arik, de la générosité de leurs proches. Ceux qui peuvent se le permettre louent un logement.

Harcun Ercan, porte-parole du cabinet du maire de Diyarbakir (élu par la population locale), a dit à IRIN que 70 pour cent des civils des secteurs touchés par les violences avaient fui.

Ces déplacements viennent s’ajouter à la pauvreté qui affectait déjà de nombreux habitants de Sur. Selon M. Ercan, la municipalité distribue des colis alimentaires et porte assistance aux familles déplacées.

De nombreux commerces ayant fermé ou été détruits, beaucoup n’ont plus les moyens de louer un logement. Ceux qui pouvaient se le permettre se sont quant à eux retrouvés dans des appartements vides, sans matelas ni appareils électroménagers.

« La situation est terrible, » a dit M. Ercan. (...)

Aucune organisation internationale n’a offert son aide pour l’instant. (...)

Châtiment collectif ?

De nombreux Kurdes sont en colère contre ce qu’ils considèrent comme une intransigeance de la part du gouvernement face au désespoir des civils. (...)

Deux discours bien différents ont pris forme.

D’un côté, M. Davotuglu a affirmé que « mis à part à Sur, la vie suit son cours normal dans le reste de Diyarbakir. »

De l’autre, selon M. Gardner, « tout cela commence à ressembler à un châtiment collectif. » (...)