
La crise du capitalisme mondial se décline en Europe sous une forme qui ne laisse pas de surprendre le citoyen, tellement le discours ambiant la pare de qualificatifs trompeurs : crise grecque, crise des dettes publiques, crise de l’euro, et dernièrement crise de gouvernance européenne. Beaucoup de questions que tous (non-économistes comme économistes) se posent portent sur la création monétaire dont on pressent qu’elle est sous-jacente aux rapports de force qui s’expriment pour résoudre la crise.[1]
(...) le trapéziste a un filet dont il ne se sert pas pour voltiger, puisqu’il ne le touche jamais ; il ne se sert que de filins, de cordes et de barres, mais le filet est là qui ne sert à rien sauf si… Pour les banques, ces dépôts ne sont pas reprêtés mais ils sont là pour exprimer, par leur masse, la couverture de la banque en termes de liquidités au milieu de la concurrence. On peut dire que ces dépôts « autorisent » une politique abondante de crédits, sans pour autant que ce soit eux qui soient prêtés. (...)
L’anticipation de la production d’un surplus que représente le crédit suppose trois conditions pour être validée :
– La monnaie possède une légitimation politique qui fait d’elle une institution sociale. Ce n’est pas un hasard si l’euro, qui n’a jamais reçu de véritable légitimation démocratique, est en crise.
– La banque centrale contrôle suffisamment la pratique bancaire pour que celle-ci soit orientée vers des activités utiles et non vers la spéculation. Ce n’est pas non plus un hasard si, l’essentiel de la création monétaire dans la zone euro pendant la décennie 2000 étant allée vers les circuits purement financiers, la crise est aujourd’hui aussi profonde.
– L’anticipation de l’activité future par la monnaie nouvelle doit être suivie d’un travail productif dont le résultat sera vendu sur le marché ou accepté par la collectivité s’il s’agit de services non marchands. Ce n’est pas un hasard si la mise au chômage de 10 % ou plus de la population active, la précarité et la baisse relative des salaires dans la valeur ajoutée ont fini par créer une crise monumentale.
Aucune de ces trois conditions n’a été convenablement remplie dans la période du capitalisme néolibéral.
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la monnaie est ambivalente puisqu’elle est instrument d’accumulation privée mais qu’elle peut aussi, lorsqu’elle est sous contrôle démocratique, être instrument du lien social puisque, par son intermédiaire, une part de la richesse peut être socialisée (santé publique, éducation, retraites).
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