
Dès l’annonce, le 26 août 2013, du plan gouvernemental de réforme des retraites, l’ensemble des éditorialistes, des chroniqueurs et des rédacteurs spécialisés se sont levés comme un seul homme pour dénoncer la modestie de la réforme et des mesures trop peu « ambitieuses » à leur goût. Tous ou presque regrettaient l’occasion manquée de mener « la » grande réforme « structurelle » qui bouleverserait enfin un système qu’ils jugent trop dispendieux, et donnaient rendez-vous à leurs lecteurs dans quelques années pour de nouveaux sacrifices…
Un consensus médiatique à peu près total qui pourrait sembler stupéfiant si depuis vingt ans l’on n’avait pas été habitué, sur cette question des retraites plus que sur toute autre, à un rabâchage aussi univoque que systématique [1]. Petit tour d’horizon, monotone par la force des choses, des commentaires parus dans la presse écrite les 27 et 28 août. (...)
S’il fallait encore démontrer l’absence de pluralisme des opinions parmi les « grandes signatures » de la presse, la simple lecture des titres des articles consacrés aux annonces du Premier ministre constituerait une preuve irréfutable. Tous ces titres sont interchangeables et pourraient coiffer des articles déroulant une seule et même analyse : la réforme présentée par le gouvernement ne va pas assez loin, assez vite et assez fort... (...)
une fois de plus, les grands médias ont basé leur commentaire de la réforme gouvernementale sur le postulat selon lequel les retraites devaient être drastiquement harmonisées par le bas, sans jamais évoquer, ne serait-ce que pour les écarter, des mesures alternatives qui aborderaient la question sous l’angle des arbitrages macroéconomiques, du partage de la richesse nationale, de la solidarité interprofessionnelle et intergénérationnelle.
Dans ces conditions qui interdisent tout débat de fond un tant soit peu approfondi, les commentateurs ont le champ libre pour ramener la discussion sur le terrain politicien qu’ils affectionnent tant. (...)