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Déchets et inégalités : des lycéens de Saint-Denis en débattent sans oeillères
Article mis en ligne le 14 septembre 2016
dernière modification le 6 septembre 2016

Des terminales ES du lycée Suger, à Saint-Denis, ont cherché à comprendre pourquoi les quartiers populaires sont plus sales que les autres. Inégalités, cultures, urbanisme : ils ont clairement discuté des différentes dimensions du problème.

« Pourquoi voit-on plus de déchets dans les quartiers populaires ? » Dans leur article, réalisé dans le cadre d’un atelier Climat et quartiers populaires, les élèves d’une classe de terminale économique et sociale (ES) du lycée Suger, à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), ont choisi de poser cette question délicate — et réussi à y apporter des pistes de réponse. Un travail de plusieurs mois, qu’ils ont présenté à une autre classe de terminale ES lors d’une rencontre organisée au CDI de l’établissement, lundi 23 mai. (...)

Mohamed et Fanida ont préparé quelques questions destinées à la chercheuse, dont l’association mène des campagnes de sensibilisation aux déchets et à la surconsommation. (...)

« Le geste de jeter par terre a aussi une dimension contestataire »

Mais d’autres paramètres entrent en jeu, comme la politique appliquée au quartier, qui va déterminer si les gens s’y sentent bien : « On nettoie son espace, souligne la sociologue. C’est une question d’appropriation. Si l’on ne se sent pas chez soi dans son quartier, on aura moins de difficultés à laisser les déchets en dehors des poubelles. Ce geste de salir a aussi une dimension contestataire, en disant : “Vous ne faites rien pour nous, pourquoi ferions-nous des efforts ?” »

Des appartenances culturelles et de classe sociale jouent aussi, comme le montre « l’habitude du pain jeté par la fenêtre chez certains habitants, analyse Maëlle Cappello. De l’extérieur, ça peut sembler sale. Mais dans la culture arabe, où l’on ne jette pas le pain, c’est une manière de ne pas le gâcher, de nourrir les oiseaux. Les perceptions changent aussi en fonction des classes sociales, des revenus et de l’éducation : dans certaines familles, les restes d’un repas sont considérés comme des déchets et jetés, alors que dans d’autres, ils seront conservés et cuisinés au repas suivant. » (...)

Comment remédier à la situation ? Les élèves misent sur la sensibilisation « dès la maternelle », juge Ahmed qui ne fait pas le tri « alors [qu’il sait] que c’est important et que les darons le disent, que tout le monde le dit ». « Il faut faire des pubs, des trucs touchants, poursuit Abderrezak. Avec des projections et des débats dans le quartier ! »

« Et la surconsommation ? intervient Maëlle Cappello. 80 % des déchets qu’on produit ne sont pas visibles parce qu’ils ne traînent pas dans les rues... » Les garçons sont dubitatifs : « Les entreprises produisent trop, c’est vrai, mais si elles produisent moins l’économie tournera moins bien, redoute Graigy. En plus, à Saint-Denis, les gens consomment peu car ils n’ont pas les moyens. » (...)