
Eaux glacées a recueilli le témoignage d’un usager qui, après avoir constaté la présence de goutelettes d’hydrocarbures - pouvant avoir un impact cancérigène -, dans l’eau potable distribuée à son robinet, a conduit une véritable enquête aux conclusions inquiétantes, corroborées par un avis de l’ANSES daté de juillet 2011 qui, tout en reconnaissant le phénomène, préconisait la réalisation de travaux complémentaires, qui n’apparaissent pas été mis en oeuvre depuis lors avec toute la vigilance requise. Au coeur de cette affaire, la question lancinante du renouvellement des 850 000 kilomètres de canalisations qui nous délivrent le précieux liquide « destiné à la consommation humaine », pour reprendre son appellation officielle.
« Je souhaite sensibiliser le public à une problématique de grande envergure : la nécessaire rénovation du réseau urbain de distribution d’eau potable, face à un risque sanitaire majeur.
Un réseau de distribution d’eau vétuste peut être à l’origine de nombreuses pollutions, l’une d’elles se manifeste sous le forme suivante : des gouttelettes visqueuses et odorantes d’hydrocarbures, sortant du robinet au domicile des particuliers.
Je puis en témoigner, car j’en suis moi-même régulièrement victime, et mes récentes recherches sur le sujet m’ont finalement permis de lever le voile sur ce mystère jalousement gardé. Comment des hydrocarbures peuvent-elles se former dans le réseau de distribution d’eau ?
Voici la réponse : le phénomène est parfaitement décrit dans le rapport ANSES n°2010-SA-0184 (Juillet 2011).
Jusque dans les années 80, on utilisait des conduites en fonte ou en acier, avec un revêtement interne d’étanchéité en matière « hydrocarbonées » (c’est-à-dire du goudron, ou du brai de houille).
Ce produit était aussi utilisé pour les joints des conduites, ainsi que pour les joints des réservoirs d’eau (en acier ou en béton), sur le site de production.
Ces matières hydrocarbonées, utilisées comme étanchéifiant, contiennent un composé : l’anthracène, qui, en réagissant avec le chlore contenu dans l’eau, forme de l’Anthraquinone (un Hydrocarbure Aromatique polycyclique ou HAP).
Il faut savoir qu’environ 20% des canalisations de France sont concernées, essentiellement en milieu urbain.
Il y a donc des hydrocarbures qui se forment (par réaction chimique) à l’intérieur des anciennes conduites d’eau, et ces hydrocarbures peuvent occasionnellement se détacher, et venir polluer l’eau du robinet.
Cela se produit notamment lors d’opérations de maintenance effectuées par le distributeur, par exemple le nettoyage de cuves, la manœuvre de vannes, car cela provoque des fluctuations de débit dans les conduites, ce qu’on appelle des « coups de bélier ».
Les fluctuations de concentration en chlore dans l’eau, peuvent aussi favoriser le relargage de l’anthraquinone dans le réseau d’eau potable.
La seule solution est de remplacer ces anciennes conduites par des nouvelles, en PVC, comme l’indique l’Instruction du Ministère de la Santé (...)
C’est là que le problème commence, car cette opération peut être très onéreuse (...)
L’entretien du réseau de distribution incombe à l’entreprise qui exploite le réseau, celle-ci va donc par nature, TOUT faire pour échapper à cette obligation (légale) de rénovation. (...)
C’est la santé de quartiers entiers qui est menacée par le rejet d’hydrocarbures potentiellement cancérigènes dans l’eau du robinet.
En niant cette réalité, et en empêchant l’identification du problème (et surtout, sa résolution), les fournisseurs d’eau (et leurs complices) sont donc coupables de « mise en danger de la vie d’autrui ». (...)