
Le 22 juillet est la journée internationale contre la méga-industrie minière. En Colombie, l’exploitation du charbon s’effectue en multipliant les violations des droits de l’homme. EDF compte parmi les clients de ce « charbon de sang ».
Attablée dans un café parisien, Maira Mendez Barboza rassemble ses forces. Nous sommes le 11 mai, la veille de l’assemblée générale d’EDF. La jeune femme est bien décidée à interpeller l’énergéticien français sur ses achats de « charbon de sang » aux entreprises minières Drummond et Prodeco/Glencore, accusées de graves violations des droits de l’homme dans le département de Cesar, en Colombie. Les yeux dans le vague, elle se remémore une fois de plus la scène atroce de l’assassinat de son père, syndicaliste et employé de Drummond, le 19 février 2002. (...)
« À un moment, il m’a appelée pour que je lui apporte son portefeuille, poursuit Maira Mendez Barboza. Les paramilitaires étaient en train de l’interroger : depuis combien de temps travaillait-il pour Drummond ? Était-il syndicaliste ? Après mon départ, ils lui ont dit qu’il était une personne indésirable et l’ont menotté. Nous avons entendu des tirs, puis ils sont partis. Avec ma mère, nous sommes sorties précipitamment, avec l’espoir qu’il était en vie, que c’était juste un cambriolage. Mais j’ai vite vu le corps sans vie de mon père, criblé de neuf balles. Ils lui avaient tiré dessus avec des fusils et des 9 mm. J’avais quinze ans »
« Les entreprises déclarent la guerre à la seule organisation syndicale indépendante » (...)
Entre 1996 et 2006 , quelque 3.100 personnes ont perdu la vie sous les coups des paramilitaires, d’après une note des Amis de la Terre. 55.000 habitants ont fui leurs villages et plus de 300 personnes sont encore portées disparues.
Quel est le lien avec l’Étasunien Drummond et Prodeco, filière colombienne du Suisse Glencore ? L’ONG néerlandaise Pax a mené l’enquête (lien en anglais) pendant plus de deux ans auprès d’anciens paramilitaires : au moins neuf d’entre eux ont témoigné de liens entre leurs fronts et les entreprises minières. « Installées en zone de conflit, ces entreprises ont attiré les paramilitaires pour assurer leur sécurité », analyse Maina van der Zwan, de l’ONG Pax. Selon l’organisation néerlandaise, Prodeco aurait payé plus de 900.000 dollars à des paramilitaires via un fournisseur alimentaire, au moyen notamment de notes de frais gonflées. (...)
Pour les Amis de la Terre et l’ONG Pax, c’est clair : les entreprises européennes qui achètent la plus grosse partie du charbon produit à Cesar, parmi lesquelles EDF, doivent cesser au plus vite leurs importations et s’assurer que Prodeco/Glencore et Drummond s’engagent à ce que justice soit faite pour les familles des victimes. (...) Et suivre ainsi l’exemple de l’entreprise énergétique danoise Dong, qui a annoncé en avril dernier la suspension de ses contrats avec Prodeco/Glencore, quelques années après avoir suspendu ses relations avec Drummond pour des raisons éthiques. (...)
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