
Christophe
Le 13 novembre 2015, une série de fusillades et d’explosions ont endeuillé Paris et Saint-Denis, provoquant la mort d’au moins 130 personnes. Les auteurs de ces attentats, souvent des jeunes Français musulmans, ont motivé leur acte en invoquant l’intervention militaire de leur pays en Syrie contre l’Organisation de l’Etat islamique (OEI). Deux jours plus tard, Paris a procédé à de nouveaux bombardements contre les positions de l’OEI en Syrie, principalement dans la « capitale » de l’organisation, à Rakka. Et, dorénavant, le gouvernement français comme l’opposition de droite s’accordent sur la nécessité de multiplier les « frappes » en Syrie. L’urgence de mener sur le front intérieur une « guerre » implacable ne les distingue pas davantage.
La seule question qui semble faire débat entre eux tient à la composition de la coalition internationale combattant l’OEI. Avec ou sans la Russie ? Avec ou sans l’Iran ? Avec ou sans le gouvernement syrien ? (...)
Décidée de manière solitaire, sans débat public, sans participation autre que purement décorative du Parlement, dans un alignement médiatique conforme aux habitudes du journalisme de guerre, l’intervention militaire française soulève néanmoins plusieurs questions de fond. (...)
L’autre question fondamentale tient à la légitimité et à l’efficacité des interventions militaires occidentales par rapport même aux buts qu’elles s’assignent. (...)
Comme toujours, le discours de « guerre » se double d’un dispositif sécuritaire et policier renforcé. On sait à quels excès cela a donné lieu aux Etats-Unis. En France, il est déjà question de rétablissement des contrôles aux frontières, de déchéances de nationalité et de modification de la Constitution afin, comme vient de l’expliquer le président de la République, de « permettre aux pouvoirs publics d’agir contre le terrorisme de guerre ». (...)
L’actuel climat d’affolement et de surenchère sécuritaire favorise par ailleurs les suggestions les plus inquiétantes. Ainsi celle d’incarcérer les « suspects » de djihadisme, ou de radicalisation, ce qui reviendrait à confier à la police et à l’administration le droit de rendre la justice, y compris pour décider unilatéralement des mesures privatives de liberté. (...)