
Ecrire à des gens qui ne répondent pas, éprouver leur silence, se sentir méprisé, regarder les autres se déplacer, charger les enfants dans la voiture, filer au travail, courir pour quelque chose, écrire à des gens qui ne répondent pas, recommencer, réviser son curriculum vitae, se dire que ça doit venir d’une mauvaise maquette, d’un choix de typo erroné puisqu’ils ne voient pas l’expérience, les savoirs multiples, puisqu’ils ne voient pas le type derrière qui sait faire, rencontrer son conseiller, tirer un bilan de ce rien, du temps qui passe qui ne contient pas de vie, de moins en moins de vie, refuser l’invitation au restaurant, affronter la peur d’ouvrir la boîte à lettres, laisser les enveloppes s’empiler sans plus les ouvrir, nier les factures ne les fait pas disparaitre, écrire à des gens qui ne répondent pas.
Regarder la télé, découvrir qu’il y a des vacances, qu’ils s’en vont skier, qu’il fait beau quelque part, entendre les politiques te critiquer, te décrire comme celui qui ne veut pas travailler, écrire à des gens qui ne répondent pas, se greffer un sourire de caissière pour démarcher des boîtes, déposer un CV, le nouveau qui est si bien pensé, attendre que ça sonne enfin, décrocher le téléphone, entendre la télé-actrice mal réciter son texte, partir se coucher, se réveiller sans projet pour la journée, s’ennuyer, éprouver le silence, observer par la fenêtre la vie qui passe, se remotiver, écrire à des gens qui ne répondent pas.
Décrocher un rendez-vous, préparer l’entretien, travailler sur un projet, détailler méticuleusement le pourquoi et le comment, budgéter, retrouver de l’énergie dans la démonstration, y penser jusque dans son sommeil, soigner sa présentation, repasser une chemise, respirer profondément, visualiser, chasser le trac, se construire un mental d’acier, saisir sa chance, subir les questions, devancer le doute, donner vie au futur par des phrases et attendre, recevoir la réponse, ne pas suffire, n’être pas choisi, être laissé pour compte.
Pleurer pour rien sous la douche (...)