Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
La Marseillaise
Elior, scandale politico-industriel
Article mis en ligne le 28 novembre 2018

183 employés obligés de rembourser l’équivalent de deux ans de salaires parce que les règles du jeu ont changé en cours de route en faveur des patrons suite à un lobbying efficace auprès des députés : bienvenue dans le monde d’Elior, société de nettoyage.

Depuis quelques semaines, les huissiers ont commencé à débarquer chez des salariés marseillais ou aixois d’Elior. La société de services d’hygiène, notamment en charge de la propreté des établissements hospitaliers, a fait appel à des agents de recouvrement pour leur réclamer entre 25 000 et 30 000 euros, soit plus de deux années de salaires pour ces employés. La cour de cassation a invalidé le 30 mai dernier les arrêts qui avaient été rendus en leur faveur dès 2012 et par lesquels ils avaient obtenu des avantages financiers.

1. Au départ, les salariés gagnent (...)

Elior fait appel. Non seulement la cour d’Aix confirme en 2016 et 2017 les décisions des prud’hommes pour la période 2008-2012 mais, en plus, oblige l’entreprise aux mêmes versements pour les années qui suivent. Elior s’acharne et décide d’aller en cassation.

2. Les règles du jeu changent en cour de route
Mais entre appel et cassation, les règles du jeu changent. La loi El Khomri de 2016 instaure un amendement qui « limite les effets du principe à travail égal, salaire égal aux seuls salariés travaillant sur un même site » et non plus, comme c’était la règle, à l’entreprise.

Dans la foulée, les ordonnances Macron précisent que « ces nouvelles dispositions sont applicables aux contrats de travail quelle que soit la date à laquelle ces contrats ont été repris ». En mai dernier, la cour de cassation se réfère à ces deux éléments et permet à Elior d’aller aujourd’hui réclamer aux salariés ce que la justice leur a accordé hier.

3. Le lobbying des patrons
Pourquoi un tel revirement en faveur des patrons du nettoyage ? Face aux contentieux qui se multiplient dans le secteur, la Fédération des entreprises de propreté (FEP) décide de réagir en s’adressant directement le ministère du Travail. Dans un compte rendu à destination de ses adhérents en janvier 2015, elle dévoile clairement ses intentions : « Vu l’interprétation de plus en plus extensive du principe à travail égal, salaire égal par la cour de cassation, le risque d’expansion d’un avantage localement concédé à l’ensemble des salariés de l’entreprise est important. Ces contentieux fragilisent les entreprises. » Son lobbying est payant. (...)

4. Un scandale judiciaire
Devant de telles méthodes, les salariés du nettoyage ont décidé par l’intermédiaire de leur avocat de saisir la Cour européenne des droits de l’Homme pour violation de l’article 6-1 de la convention. « On démontrera comment des parlementaires trafiquent la loi pour la mettre au service des grandes entreprises, souligne maître Vignaud. Si juridiquement on me donne raison, mais que politiquement on me donne tort ce sera insupportable ! »