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Rue89 Bordeaux
Elles racontent le long chemin pour sortir de la rue
Article mis en ligne le 22 novembre 2017

La Bordelaise Anaïs Cadilhon cosigne un documentaire avec deux femmes qui ont longtemps vécu sans domicile fixe. Dans « Et maintenant les cimes », on y découvre la difficile reconstruction de la vie après l’errance. À voir à partir de ce lundi dans le cadre de la Quinzaine de l’Egalité.

« On imagine, une fois la personne sortie de la rue et logée dans un appartement, que tout va bien se passer, qu’elle va refermer ses blessures et retrouver une vie normale. C’est plus compliqué que ça. Il y a un temps de doute et d’appropriation très long. »

Ce constat d’Anaïs Cadilhon est mis en image dans son documentaire « Et maintenant les cimes », dont la première projection a lieu ce lundi à Bordeaux (voir encadré). Après avoir mené des recherches sur le « sans logisme » des femmes dans le cadre de son master en anthropologie, elle présente un second volet consacré à la vie de ces femmes qui ont trouvé un logement après une longue errance dans la rue. Et la chercheuse bordelaise se pose la même question : quel regard portent ces femmes sur elles-mêmes ? (...)

Dans un premier temps, en 2014, le résultat a fait l’objet d’exposition de photographies, Anaïs Cadilhon avait confié des appareils photo jetables à six femmes dans la rue qui ont rapporté des images de leur quotidien. Trois ans plus tard, c’est par un documentaire de 53 minutes que le quotidien de deux femmes ex-SDF est transmis. Elles sont munies d’un caméscope avec pour seule directive de filmer des bribes de leur nouvelle vie.

Ainsi, Anaïs Cadilhon voulait voir « ce qui se passe derrière la porte ». De février jusqu’à fin octobre 2017, Elina et Jaky ont filmé ce qu’elles voulaient : des moments seules, des moments en compagnie, des détails de leurs intérieurs ou les paysages par les fenêtres… « tout ce qu’elles voulaient bien dévoiler » (...)

interrogée par Rue89 Bordeaux, Jaky avoue ne pas être « quelqu’un qui met sa vie en avant comme ça » :

« Ma vie est souvent dans l’ombre et pas dans la lumière. Si j’ai accepté ce projet, c’est pour dire que nous ne sommes pas les derniers, il y a encore des gens dehors. […] Dans la rue, on sait tous qu’il y a une solution, mais on a du mal à la trouver, à tomber sur la bonne personne qui peut nous donner une chance. Il faut tenter et persévérer ensuite. Ce n’est pas gagné en une journée. J’ai réussi au bout de 4 ans (après avoir vécu à la rue de 2005 à 2008), après avoir voulu oublier qui j’étais ».

La frontière

Cette nouvelle vie fut tout aussi difficile à construire pour Elina. En manque de repères, elle dit se sentir mieux dans son appartement actuel de 19 m2 que dans le premier de 37 m2. Car « il ne faut pas oublier que dans la rue, la nuit surtout, on cherche des petits espaces pour se protéger ». (...)