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Emplois poubelle pour prospectus jetable
L’extrait que nous vous présentons ici, en exclusivité, est tiré du livre de Julien Brygo et Olivier Cyran, Boulots de merde ! Du cireur au trader, enquête sur l’utilité et la nuisance sociales des métiers (Éditions La Découverte). Disponible, depuis peu, dans toutes les bonnes librairies.
Article mis en ligne le 18 octobre 2016
dernière modification le 11 octobre 2016

Les dépliants criards qui inondent votre boîte aux lettres pour vous fourguer des mezzanines en kit ou vous inviter à la semaine du cassoulet de Super U ne tombent pas du ciel : ils vous sont délivrés par des dizaines de milliers de paires de jambes qui sillonnent quartiers, résidences pavillonnaires et zones rurales pour une poignée de piécettes, le plus souvent sans qu’on les remarque. Un « capital humain » qui fait la « force » et la « fierté » d’Adrexo, lit-on sur son site Internet. [...]

Cette industrie du remplissage de nos poubelles constitue un marché hautement convoité. La Poste s’y positionne en bon deuxième, via sa filiale privée Mediapost, dont les dix mille colporteurs servent à roder les méthodes de pressage des ressources humaines étendues ensuite au métier de facteur. Les quelque vingt milliards d’imprimés publicitaires déversés chaque année alimentent un système de rotation d’emplois aussi jetables que les prospectus eux-mêmes. Il suffit de se promener sur le parking d’un centre de distribution Adrexo - on en compte deux cent cinquante dans le pays – et de parler avec les trimardeurs en train de charger des dizaines de kilos de paquets dans leur voiture. Ce sont tous des pauvres, français ou immigrés, avec les habituelles variantes : jeunes en réinsertion, allocataires des minima sociaux qui rament pour quelques sous de plus, étudiants pris à la gorge par le montant de leur loyer, mères isolées qui ne trouvent pas de meilleure solution pour nourrir leurs gosses, retraités qui ne s’en sortent pas. Ceux-là, les retraités, sont particulièrement nombreux. Le « capital humain » d’Adrexo ? Les naufragés du monde du travail qui se débattent pour ne pas couler à pic. [...]

la préquantification du temps de travail. Une merveille de régime dérogatoire, source inépuisable de « merdification » pour les corps de métiers qui lui sont soumis – comme les routiers, les ouvriers du bâtiment ou les forçats de la restauration. Le principe est d’une simplicité lumineuse : l’employeur quantifie en amont le temps de travail qu’il juge nécessaire à l’exécution d’une tâche, et tant pis pour le salarié incapable de s’y tenir. Si sa durée effective de travail sort des clous fixés par le patron, ce n’est évidemment pas parce que celui-ci a opéré un calcul étriqué ou malhonnête : cela prouve simplement que le travailleur n’est pas assez efficace ou qu’il a un poil dans la main. En aucun cas il ne pourra réclamer le versement des heures supplémentaires correspondant au travail réellement fourni. (...)