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Orient XXI
En Mauritanie, la lutte toujours recommencée contre l’esclavage
Article mis en ligne le 25 juin 2014
dernière modification le 22 juin 2014

(...) L’ombre de l’esclavage plane sur l’élection présidentielle prévue le 21 juin 2014, même si la portée du scrutin se trouve amoindrie par le boycott des principales formations de l’opposition. Sur les cinq candidats déclarés, deux appartiennent à la communauté des anciens esclaves, les Haratine1, parfois encore appelés « Maures noirs ». Le président sortant, certain de l’emporter, a confié la direction de sa campagne à un cadre haratine qui a longtemps milité au sein de l’opposition. (...)

Selon le rapport 2013 de l’ONG internationale The Global Slavery Index, le nombre de « citoyens » mauritaniens encore soumis à l’esclavage varie entre 400 et 600 000 personnes sur 3 millions et demi d’habitants. Un chiffre fortement contesté par le gouvernement, qui s’obstine à nier l’existence de l’esclavage dans le pays et parle seulement de ses « séquelles ». Plus de 80 % des esclaves ou anciens esclaves demeurent mobilisés au sein des structures traditionnelles, c’est-à-dire les tribus. Être esclave, cela signifie appartenir à quelqu’un d’autre, et travailler pour lui sans contrepartie ; ne pas avoir accès à la propriété, ni à l’éducation, ni à la santé et être privé d’héritage pour soi-même et pour ses enfants. Les Haratine, bien qu’affranchis, sont quant à eux toujours victimes de discriminations. (...)

Sous la pression de la communauté internationale et des militants de l’intérieur, le gouvernement du président Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya (1984- 2005) a adopté en 2003 une loi interdisant la traite des personnes. Mais il a fallu attendre l’éphémère gouvernement civil du président Sidi Ould Cheikh Abdellahi (avril 2007-août 2008) pour la promulgation de la loi qui incrimine l’esclavage et punit ses auteurs.

L’adoption de cette loi à l’unanimité au parlement récompensait le combat d’un homme : Messaoud Ould Boulkhair. Ce descendant d’esclave, qui a gravi tous les échelons de l’administration mauritanienne, a été promu ministre en 1984. Il est le premier Haratine à occuper un tel poste (...)

Le gouvernement a récemment adopté en collaboration avec l’ONU une feuille de route pour l’éradication de l’esclavage. Elle comprend 29 mesures visant à y mettre fin dans une période d’un à deux ans. Elles vont de l’amendement de la loi 2007-048 incriminant l’esclavage à l’obligation de promouvoir des projets pour l’insertion des victimes, leur indemnisation par les auteurs d’actes esclavagistes, l’accès à la propriété foncière, l’exécution des décisions de justice, la création d’une institution de haut niveau chargé de lutter contre les séquelles de l’esclavage, l’assistance aux victimes, l’accès des enfants des anciens esclaves à l’école, l’instauration d’une journée de lutte contre l’esclavage, l’implication de la société civile, le renforcement des moyens des ONG, la création d’une commission de suivi ou l’évaluation périodique du travail accompli. (...)

Mais les associations mauritaniennes de lutte contre l’esclavage sont loin d’être satisfaites. Non seulement les ONG estiment avoir été tenues à l’écart de la préparation et de l’élaboration de cette feuille de route, mais elles jugent que l’État ne fait que lancer de la poudre aux yeux de la communauté internationale. (...)