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France TV Info
En Moselle, une inexorable montée des eaux souterraines depuis l’arrêt des mines de charbon
Article mis en ligne le 8 novembre 2021
dernière modification le 7 novembre 2021

Avec la fin du pompage des galeries et la déprise industrielle, les nappes phréatiques se reconstituent dans l’ancien bassin houiller lorrain. De nombreuses habitations devront leur salut à de futures opérations de pompage ciblé.

"On a eu des canards, des poules d’eau... Une dame m’a demandé comment j’avais réussi à avoir des grenouilles. C’était un vrai zoo." Pendant près de quatre ans, entre 2014 et 2018, le jardin d’Eric Merten a été recouvert par 80 centimètres d’eau, quelle que soit la météo. Un vrai mystère au cœur de Creutzwald (Moselle). "Les pompiers sont venus deux fois pour pomper, mais l’eau revenait en quelques heures", poursuit sa femme Amélie, assistante maternelle alors en peine pour exercer son activité à domicile. La rivière toute proche, la Bisten, n’était pas en cause, pas plus qu’un hypothétique microclimat diluvien : l’eau montait littéralement du sol. "Evidemment, l’humidité arrivait dans la maison." (...)

Aussi surprenante soit-elle, cette inondation est la conséquence du passé minier lorrain. Depuis que l’extraction du charbon a cessé, il y a vingt ans, les nappes phréatiques remontent dans tout l’ancien bassin houiller. Les Merten ont dû leur salut à l’installation d’une pompe dans le voisinage, qui devra tourner à tout jamais, jour et nuit. "En quelques jours, c’était fini." Bilan ? "Une douzaine d’arbres fruitiers fichus, un hangar de 50 mètres carrés pourri, des mois de stress" et des travaux titanesques de déblayage. "Des roseaux avaient même poussé, avec leurs racines de 40 ou 50 centimètres..." Le couple doit désormais arroser ses légumes. (...)

Chaque année, les deux "forages de rabattement" de Creutzwald pompent plus d’un million de mètres cubes dans les nappes phréatiques, en attendant un troisième en 2022. Sans eux, certains secteurs habités se transformeraient en étangs. Ces efforts débutent à peine. La remontée des eaux devrait concerner des zones toujours plus vastes et "le phénomène est inéluctable", précise un document de la préfecture de Moselle. Il va falloir pomper et pomper encore pour sauver des quartiers menacés.
Jusqu’à 17 000 logements menacés (...)

Tout a basculé quand l’exploitant Charbonnages de France (CdF) a fermé les 58 puits mosellans, le dernier en 2004 à La Houve. "On aurait jamais dû arrêter de pomper cette eau des galeries minières, mais ça a un coût" (...)

"Il y a moins d’infiltrations vers les réservoirs miniers et moins de prélèvements d’eau en surface, donc les nappes phréatiques se reconstituent."
Vincent Quéré, responsable de la division travaux au Département prévention et sécurité minière, à franceinfo
(...)

"Cette remontée de nappe s’est produite plus rapidement que prévu", souligne Vincent Quéré, responsable de la division travaux et géotechnique au Département prévention et sécurité minière (DPSM) du Bureau de recherches géologiques et minières. (...)

A l’époque, l’Etat avait lui-même demandé à CdF "de prendre ses dispositions pour que la nappe phréatique reste à plus de trois mètres sous le bâti." Mais rien n’avait été lancé. (...)

A l’époque, l’Etat avait lui-même demandé à CdF "de prendre ses dispositions pour que la nappe phréatique reste à plus de trois mètres sous le bâti." Mais rien n’avait été lancé. (...)

Devenu ayant droit de la compagnie après sa liquidation, l’Etat n’a d’abord rien fait pour remplir cet objectif. "Jusque-là, il estimait qu’il s’agissait d’un phénomène inéluctable et naturel, et ne prévoyait donc pas d’accompagnement", relate Xavier Iochum. Il a fallu une action en justice lancée par les communes, et la nomination d’un expert, pour faire bouger les choses. En mars 2021, la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili a écrit au préfet pour insuffler une nouvelle stratégie. Début octobre, ce dernier s’est engagé à stabiliser la nappe phréatique à moins trois mètres sous le bâti construit jusqu’en 2020 et soumis aux aléas miniers.

En parallèle, il a aussi "fallu jouer sur l’amplitude de la remontée des nappes, en pompant dans le réservoir minier", explique Sonia Heitz, responsable de la division eau et environnement au DPSM. (...)

"L’eau du sol ou la rivière aura notre peau"

Pour ne rien arranger, certains quartiers se sont affaissés car les sous-sols sont criblés d’anciennes galeries non remblayées. (...)

Sous les pieds des habitants de Rosbruck se trouve l’ancien champ de Cocheren, une zone d’extraction minière. Ils pointent du doigt des galeries laissées vides, au nom de la rentabilité. "Auparavant, on prenait le charbon et ensuite, on remplissait les galeries avec du sable et de l’eau, détaille Patrick Niggemann. Parfois on remblayait au schiste mais c’était plus compliqué." Tout a changé en 1985, alors que CdF traversait des difficultés économiques. Les galeries n’étaient plus comblées, ce qui a accentué le phénomène d’affaissement.

"Un jour, le directeur général des mines a dit aux syndicats que si on devait continuer à remblayer, on allait fermer. On a donc arrêté parce que ça coûtait trop cher, et on a foudroyé [condamné les galeries] sans remblayage."
Patrick Niggemann, ancien employé des mines, à franceinfo

Sous les pieds des habitants de Rosbruck se trouve l’ancien champ de Cocheren, une zone d’extraction minière. Ils pointent du doigt des galeries laissées vides, au nom de la rentabilité. "Auparavant, on prenait le charbon et ensuite, on remplissait les galeries avec du sable et de l’eau, détaille Patrick Niggemann. Parfois on remblayait au schiste mais c’était plus compliqué." Tout a changé en 1985, alors que CdF traversait des difficultés économiques. Les galeries n’étaient plus comblées, ce qui a accentué le phénomène d’affaissement.

"Un jour, le directeur général des mines a dit aux syndicats que si on devait continuer à remblayer, on allait fermer. On a donc arrêté parce que ça coûtait trop cher, et on a foudroyé [condamné les galeries] sans remblayage."
Patrick Niggemann, ancien employé des mines

à franceinfo
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