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En Syrie, cultiver la survie
Article mis en ligne le 29 mai 2015

Un étudiant qui veut témoigner à tout prix, une femme qu’une roquette a privé de ses jambes mais qui cultive la terre. Scènes d’humanité dans une Syrie ravagée par la guerre.

« J’habite dans la campagne autour de Damas, la Ghouta orientale assiégée, dans une région sans nourriture ni médicaments. Ici, les gens meurent sous les bombes larguées du ciel. Et les enfants meurent de froid et de faim aussi. Je veux transmettre leurs voix avec votre aide », m’explique-t-il lors d’une conversation début février, après une journée particulièrement meurtrière.

« Des avions de combat continuent de cibler des zones civiles, des dizaines de raids aériens. Voici quelques-uns des résultats », ajoute-t-il en joignant à son message trois photos de destructions spectaculaires, comme nous en voyons défiler sans relâche sur nos écrans. « Le plus grave, c’est que l’humanité dans ce monde [la communauté internationale] ne nous a pas aidés. Est-ce que la presse ne s’inquiète pas de cela ? ».

Début mai, je reçois de ses nouvelles un soir à minuit passé :

« Je veux vous envoyer un reportage sur une femme qui, malgré un handicap physique, sans l’assistance de quiconque, est parvenue à planter un grand terrain et à se lancer dans l’agriculture. Vous êtes preneuse ? » (...)

Fatima n’est pas capable de marcher ni de se tenir debout. En dépit de ce handicap, elle a planté seule 1 000 mètres carrés de terrain. Quand je lui ai demandé comment elle y était parvenue, elle m’a simplement répondu : « J’ai pris soin des plantes tous les jours, en rampant jusqu’à elles », avant d’ajouter : « Je souhaite revenir à la maison ».

Elle vivait à la périphérie de la Ghouta orientale, dans la localité de Deir Salman, avec la famille de son frère. Ce dernier est mort, comme sa femme et son fils, quand une fusée a frappé leur maison. Elle a été blessée par les éclats d’une roquette, cause de son invalidité. C’était le 27 juin 2013. Depuis lors et jusqu’à présent, Fatima espère toujours réaliser son rêve de retourner vivre dans sa maison et de poursuivre ses cultures ». (...)

Pendant ce temps, l’avocat et journaliste défenseur des droits de l’homme, Mazen Darwich, arrêté sans motif en février 2012 avec quatre autres membres du Centre syrien pour les médias et la liberté d’expression (SMC) cultive les récompenses internationales pour son combat et fait pousser des lentilles dans sa cellule… Histoire d’améliorer son ordinaire mais aussi d’avoir le plaisir de voir pousser des plantes dans cet univers déshumanisé.

Et la communauté internationale s’émeut du sort des ruines de Palmyre, tombée aux mains de Daech, acronyme arabe du groupe État islamique. Mais il est tard pour s’émouvoir du sort des richesses archéologiques inestimables que recèle la Syrie quand on a laissé la situation empirer pour les populations civiles depuis quatre ans. Et singulièrement, depuis l’emploi d’armes chimiques en août 2013 dans la Ghouta orientale, région où Mohammed Naji et Fatima Sayed tentent de vivre malgré tout.