
Ces deux entreprises sont parmi les toutes premières en France à expérimenter un nouvel outil juridique créé par la loi Sapin II sur la transparence de la vie économique.
Cet accord, une convention judiciaire d’intérêt public (CJIP), est une nouveauté prévue dans la loi Sapin II de décembre 2016. Avant Nanterre, seul le parquet national financier avait signé une telle convention. C’était avec la banque HSBC, qui a accepté de payer une amende d’intérêt public de 300 M€ et ne sera donc pas poursuivie pour blanchiment de fraude fiscale.
Le parquet de Nanterre, lui, a signé le 15 février avec Kaefer Wanner, une entreprise de Suresnes spécialisée dans l’isolation, le traitement de l’amiante et du plomb et la peinture. La société elle-même était mise en examen pour corruption, car certains de ses salariés avaient graissé la patte d’un agent d’EDF pour obtenir des marchés de maintenance de centrales thermiques.
Une amende de 2,7 M€
La convention judiciaire n’épargne en rien les salariés qui ont versé des commissions occultes à l’agent EDF - environ 75 000 € par an entre 2004 et 2011- ni l’agent EDF. Tous risquent bien d’être jugés par le tribunal correctionnel pour corruption. Mais elle permet à l’entreprise, personne morale, de sortir des griffes de la justice. Contre une amende conséquente : 2,7 M€. Le calcul se base tant sur les profits générés par la corruption que sur le chiffre d’affaires de la société, et tout en tenant compte des facteurs « aggravants » ou « atténuants » révélés lors des investigations.
Dans cette affaire, le même agent EDF est poursuivi pour avoir traité sous le manteau avec une deuxième entreprise, SET environnement, contre plus de 135 000 € de commission occultes entre 2009 et 2012. Le schéma est le même. Ceux qui ont payé l’agent EDF demeurent poursuivis et devraient bientôt s’expliquer devant le tribunal. Et en signant la convention judiciaire, l’entreprise elle-même sort de la procédure. Pour SET environnement, l’amende est de 800 000 €. (...)
Ces conventions d’un nouveau genre ne sont envisageables que si le juge d’instruction donne son accord. Ensuite, après trois mois de négociation au maximum, le procureur propose la convention à la signature. Il peut aussi, et c’est ce qu’a fait le parquet de Nanterre, imposer un « programme de mise en conformité » sous le contrôle de l’Agence française anti-corruption.