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l’Humanité
États-Unis. En échec sur sa loi sociale, Biden s’intéresse aux droits civiques
Article mis en ligne le 14 janvier 2022
dernière modification le 13 janvier 2022

Le président américain veut – enfin – changer les règles du Sénat afin de surmonter l’obstruction des républicains et faire adopter deux textes de loi censés sacraliser l’exercice du droit de vote.

Un an après son entrée en fonction, Joe Biden a abattu mardi ses dernières cartes. Incapable de faire voter au Sénat la grande loi sociale et climatique qui comporte nombre de ses promesses de campagne, il a décidé de jeter le peu de capital politique qui lui reste dans une nouvelle grande législation sur les droits électoraux et civiques ainsi que dans une réforme des règles du Sénat. Un casus belli absolu pour les républicains et une grande première pour celui qui a été sénateur durant trente-six ans. La force du propos s’est appuyée sur une forte charge symbolique. Le président en exercice s’est déplacé avec la vice-présidente, Kamala Harris, jusqu’à Atlanta – la ville de Martin Luther King –, métropole d’un État, la Géorgie, qui a basculé en sa faveur lors de l’élection de novembre 2020 et le « ground zero » (l’épicentre) d’une vaste entreprise du GOP (Grand Old Party, surnom du Parti républicain) pour restreindre le droit de vote.

Affairé sur le front des lois sociales et climatiques, Joe Biden n’a relancé la défense des droits civiques que ces derniers mois, au grand dam des organisations qui luttent pour ceux-ci. Stacey Abrams, fondatrice de l’une d’elles qui a permis d’inscrire 1 million d’électeurs sur les listes électorales de Géorgie et candidate, en 2018, au poste de gouverneur (ayant échoué de peu face au sortant républicain), était absente lors du discours de Biden pour « conflit d’agenda ».

Une inaction qui agace

En fait, l’inaction de la Maison-Blanche a agacé nombre d’élus, militants et électeurs, notamment africains-américains, principales cibles des lois républicaines. Quant à James Woodall, ancien président de la NAACP, la plus ancienne organisation des droits civiques, en Géorgie, il prévenait : « Nous n’avons pas besoin de plus de discours, nous n’avons pas besoin de plus de platitudes. Nous avons besoin d’action et nous en avons besoin immédiatement. »

Le discours de Joe Biden a sans doute répondu à son attente. Très offensif, le président américain a d’abord lancé : « Cela fait deux mois que j’ai des conversations discrètes avec les membres du Congrès. J’en ai assez d’être silencieux. » Il a ensuite dénoncé les législations votées par les républicains, les qualifiant de lois « Jim Crow 2.0 », en référence aux lois dites « Jim Crow », qui ont codifié la ségrégation raciale dans les États du sud des États-Unis de la fin de la guerre de Sécession (1865) à 1965.

Une majorité stérile face au « filibuster »

Après le constat, l’action : « Pour protéger la démocratie, je soutiens un changement des règles du Sénat, quel qu’il soit, pour empêcher une minorité de sénateurs de bloquer l’avancée sur l’accès au droit de vote. » Parlant d’un « tournant » dans l’histoire de son pays, l’hôte de la Maison-Blanche a assuré que « chaque membre du Sénat serait jugé par l’Histoire ». « L’Histoire n’a jamais été indulgente envers ceux qui se sont mis du côté de la restriction de l’accès au vote. Ni envers ceux qui se sont mis du côté de la subversion des élections », a-t-il appuyé.

Dans la ligne de mire des démocrates : le « filibuster ». Une règle propre au Sénat qui permet à la minorité républicaine de mener une obstruction parlementaire et de bloquer certaines lois. Adoptée en 1917, utilisée quasi exclusivement par les ségrégationnistes sudistes jusque dans les années 1960 et ressortie du placard par Mitch McConnell, le chef des républicains au Sénat, elle impose une supermajorité de 60 voix (sur les 100 sénateurs) pour tous les textes autres que budgétaires. (...)