Les socialistes font des nouvelles règles de la directive sur le détachement de travailleurs, adoptées en avril, un argument de campagne pour les élections européennes. Avec la promesse de lutter contre le dumping social. Un vœu qui ne s’est pas réalisé au Parlement européen.
Les candidats aux élections du 25 mai, le social-démocrate allemand Martin Schulz, président du Parlement européen, et Pervenche Berès, députée socialiste, présidente de la commission de l’emploi et des affaires sociales du Parlement européen, ont une fâcheuse tendance à embellir le nouveau dispositif d’encadrement des travailleurs détachés, adopté le 16 avril. Les nouvelles dispositions de la directive de décembre 1996 sur le détachement des travailleurs dans l’Union européenne serait ainsi « un pas vers l’Europe sociale des travailleurs », indiquait fort opportunément un communiqué du PS, quelques jours avant les élections municipales. (...)
Une entreprise peut en effet « détacher » ses salariés pour quʼils travaillent dans un autre pays de lʼUnion et profiter d’un système qui a ouvert la porte aux abus et à un dumping social « légal ». Un employeur européen peut ne pas respecter la totalité du droit social du pays d’accueil, notamment les cotisations sociales, salariales et patronales, qui doivent être payées dans le pays d’origine. Ainsi, pour lutter contre les abus, les députés européens ont approuvé « une meilleure protection des travailleurs détachés », affirme Pervenche Berès, en accord avec le rapporteur Danuta Jazlowiecka, député de droite du Parti populaire européen (PPE).
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Or, certains n’hésitent pas à parler de mascarade électorale. Réagissant à l’adoption des nouvelles dispositions de la directive de 1996, Raquel Garrido, candidate Front de Gauche aux élections européennes en Ile-de-France, indique que « le mécanisme central de solidarité entre donneurs d’ordres et sous-traitants, seul à même de contrecarrer le dumping social et l’exploitation des salariés détachés, a été vidé de son contenu ».
Un propos sans fondement ? En fait, le scepticisme s’impose à la lecture du texte. Commentant l’adoption de la nouvelle directive relative au détachement des travailleurs, Bernadette Ségol, secrétaire générale de la Confédération européenne des syndicats (CES) déclare qu’au « mieux, le Parlement européen a échoué à renforcer l’application de ce qui sont des droits minimum et bien faibles pour ceux et celles qui travaillent temporairement dans d’autres États membres. Au pire, il a compromis la capacité des États membres qui essaient vraiment d’appliquer cette directive de le faire à l’avenir. » La Confédération, dresse un sévère réquisitoire sur la « directive médiocre » (...)
Selon la CES, « les mesures stipulées dans la directive en vue de lʼapplication de ces droits, et dont l’exécution est laissée à la discrétion des États membres, sont faibles et les sanctions qui peuvent être appliquées ne sont pas définies. Pire encore, un État membre qui contrôlerait avec trop dʼenthousiasme la conformité à ces règles pourrait être forcé dʼen modérer lʼapplication si la Commission européenne décide que cette dernière est disproportionnée ».
Il n’y a guère que la Commission européenne à se féliciter de l’adoption de cette nouvelle directive sur le détachement de travailleur. Un soutien certes de poids dont peut se flatter le parti socialiste. Mais la fin du travail low cost n’est pas pour demain.