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Mediapart
FRANCE Le mauvais coup du fisc contre Mediapart
Article mis en ligne le 5 novembre 2015

Mediapart vient de se voir notifier un redressement total de 4,1 millions d’euros pour la période allant de sa création en 2008 à début 2014. Ignorant nos arguments, le fisc nous applique rétroactivement une TVA discriminatoire pour la presse en ligne, de 19,6 %, puis 20 %, alors qu’elle est de 2,1 % pour toute la presse, quel que soit son support. Malgré notre recours devant la justice administrative, nous sommes dans l’obligation de payer. C’est pourquoi nous en appelons à votre solidarité.

La décision du fisc, prise avec l’aval de ses ministres de tutelle au terme de près de deux années de procédure, est à la fois illégitime, injuste et incohérente. C’est ce que nous avons plaidé, en vain, lors des ultimes recours réglementaires devant les responsables hiérarchiques de l’administration fiscale, sur la foi d’un mémoire de nos avocats du cabinet Lysias (à télécharger en PDF ici).

1. Elle est illégitime car contraire au droit fondamental, qu’il s’agisse du droit constitutionnel français ou du droit de l’Union européenne.

Traduction du principe d’égalité consacré tant par la Constitution que par la Charte européenne des droits fondamentaux, le principe de neutralité fiscale interdit l’application d’une fiscalité différenciée à des activités de même nature. Alors que la presse écrite, qu’elle soit imprimée ou en ligne, s’adresse aux mêmes lecteurs, le fisc crée une distorsion de concurrence en nous appliquant une TVA près de dix fois supérieure à celle de nos concurrents imprimés. De plus, cette distorsion de concurrence pénalise la presse numérique indépendante ayant choisi, par son modèle payant, de dépendre de ses seuls lecteurs tandis qu’elle avantage les sites de presse gratuits et publicitaires, adossés à la presse imprimée existante, bénéficiaire du taux réduit de 2,1 %.

Autrement dit, l’administration fiscale s’entête à ignorer notre qualité de journal d’information générale, reconnu par la Commission paritaire (la CPPAP) et bénéficiant à ce titre d’une fiscalité indirecte réduite, dans l’intérêt des lecteurs (un prix plus abordable) et de la démocratie (l’information n’est pas une marchandise comme les autres). Appliquant les mêmes redressements discriminatoires aux autres journaux en ligne qui vivent de l’abonnement de leurs lecteurs – nos confrères du site Arrêt sur images (voir l’article de Daniel Schneidermann) et du groupe Indigo, cofondateurs avec Mediapart du Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne (SPIIL) –, le fisc nie tout simplement l’existence d’une presse en ligne, avec un statut spécifique et des droits afférents.

En invoquant contre nous une ancienne réglementation fiscale, datant d’une époque antérieure à la révolution numérique quand notre type de presse n’existait pas, il ajoute le ridicule à l’illégitimité. Alors que l’État reconnaît depuis 2008-2009 la presse numérique au même titre que la presse imprimée, l’administration fiscale se comporte comme un État dans l’État, avec ses propres règles, fussent-elles archaïques et révolues.

2. Elle est injuste car elle ajoute à ce redressement rétroactif de TVA de très lourdes pénalités (+ 40 %) pour « manquement délibéré », comme si nous avions été des fraudeurs agissant en cachette de l’administration.

L’application par Mediapart du taux de TVA propre à la presse découle des conclusions publiques des états généraux de la presse écrite, tenus en 2008, l’année même de notre création. (...)