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la pompe à phynance
G20-G8, ou la passion des faux problèmes
Frédéric Lordon
Article mis en ligne le 2 juin 2011

On ne pourra pas dire que le G20-G8 n’a pas d’idées : il en a au moins deux. Une idée théorique (variable) et une idée pratique (fixe). Une idée théorique affichée pour mieux dissimuler l’idée pratique inavouée.

Quelques effets d’apprentissage suffisent pour se faire à l’idée que les « sujets » poussés sur le devant de la scène du G20-G8 sont claironnés en exacte proportion de ce qu’ils sont inoffensifs. En 2009, l’« idée théorique » veut que bonus et paradis fiscaux soient coupables de tout. On annonce de terribles représailles. Que la réalité accompagne le fantasme n’a jamais été le souci dominant de M. Sarkozy : il suffit que les choses soient dites. (...)

En 2011, la « théorie » propose : « excès de liquidité » et « déséquilibres globaux » (global imbalances). Triple bénéfice d’une posture avantageuse mêlant la technicité et la hauteur de vue – les « déséquilibres globaux » présentent tout de même autrement mieux que ces petites histoires crapoteuses de listings et de paradis fiscaux –, de l’affichage d’un objectif de « rééquilibrage global » rigoureusement inatteignable, et (par conséquent) de la certitude d’une diversion sans espoir aucun de se refermer jamais !(...)

les mêmes qui s’étaient pâmés si longtemps à célébrer l’homme-qui-parle-à-l’oreille-des-marchés n’ont rien trouvé de mieux que d’en faire immédiatement leur tête de turc, conformément d’ailleurs à un réflexe type de la pensée libérale qui cherche des coupables pour mieux éviter de mettre en question les structures. (...)

La contradiction est logée au cœur même de la mondialisation financière : le système bancaire privé continue de devoir être porté à bout de bras par les banques centrales, la chose est spécialement vraie des banques grecques, espagnoles, irlandaises et portugaises (qui à elle seules absorbent actuellement les deux tiers des concours de liquidités de la Banque centrale européenne…) ; quant aux Etats-Unis ça n’est pas pour rien que depuis 2008 la Réserve fédérale a vu son passif multiplié par deux… Ce sont les crises financières mêmes qui forcent les réponses de la politique monétaire vouées à reproduire les crises – et ceci du fait du maintien obstiné des structures de la libéralisation financière. (...)

Il reste que les misérables petites combines destinées à faire oublier le désastre de la mondialisation financière finissent par se retourner contre leurs auteurs mêmes. Car tous les leurres lancés les uns après les autres pour en éloigner y ramènent ! Vouloir escamoter les problèmes de la mondialisation proprement financière en occupant le terrain avec les « déséquilibres globaux », créateurs d’excès de liquidités, reconduit fatalement aux impasses de la mondialisation lato sensu. Car les déséquilibres et les excès en question en sont les produits les plus caractéristiques.

(...) Wikio