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Gaz de schiste : comment la multinationale Shell fracture la planète à tout va
Article mis en ligne le 14 octobre 2014

Ukraine, Patagonie, Afrique du Sud, Tunisie… Le pétrolier Shell investit tous azimuts pour trouver du gaz de schiste et des hydrocarbures non conventionnels. Cette quête effrénée d’un nouvel eldorado pétrolier risque d’avoir de lourdes conséquences environnementales, en particulier sur les ressources en eau, menacées de surexploitation et de pollutions.

La multinationale anglo-néerlandaise est d’ailleurs nominée comme « l’entreprise la plus agressive en terme de destruction des ressources naturelles » lors des prix Pinocchio 2014 qui « récompensent » les entreprises « en totale contradiction avec le concept de développement durable ». (...)

L’entreprise anglo-néerlandaise est l’une des premières multinationales à faire l’objet de poursuites internationales pour des violations des droits humains et des destructions environnementales occasionnées par ses activités au Nigeria [2]. Shell est également particulièrement active dans le domaine des sables bitumineux canadiens (lire notre article). Plus récemment, ce sont ses projets de forages offshore dans l’océan Arctique qui ont suscité l’ire des écologistes. Greenpeace vient de mener avec succès une campagne de grande envergure pour forcer la marque de jouet Lego à abandonner un accord de sponsoring avec Shell.

Shell fait en Ukraine ce qu’elle n’oserait pas faire à l’Ouest (...)

C’est le seul pays d’Europe où Shell a pour l’instant réalisé des opérations de forage de gaz non conventionnel. [3]. Les Amis de la terre Pays-Bas se sont rendus sur place fin 2013. L’association écologiste constate alors que Shell est loin d’y respecter les exigences environnementales les plus basiques. Les ONG découvrent des bassins où sont stockées les eaux usées – extrêmement polluées – issues de la fracturation hydraulique. Ces eaux polluées ne sont séparées du sol que par une bâche en plastique. Les substances toxiques qu’elles contiennent présentent des dangers pour l’environnement et la santé humaine, à la fois en raison des risques de fuites vers les nappes phréatiques et du fait de leur évaporation dans l’air. L’évaporation de ces eaux usées libère également de grandes quantités de méthane, un gaz à effet de serre très puissant.

Profil bas aux Pays-Bas (...)

Pour les Amis de la terre, de telles pratiques sont révélatrices du « double standard » appliqué par l’entreprise : « Shell préfère chercher du gaz de schiste dans les pays où les régulations et leur application ne sont pas aussi strictes qu’aux Pays-Bas. Il est inacceptable qu’une entreprise néerlandaise comme Shell – qui n’oserait jamais s’investir dans le gaz de schiste dans son propre pays – puisse utiliser ces techniques nocives et dangereuses dans d’autres pays. » Les Amis de la terre France et Pays-Bas ont souhaité dénoncer ce zèle en nominant Shell aux Prix Pinocchio 2014, attribué par les internautes à la multinationale la plus hypocrite de l’année.

Cet activisme à l’étranger contraste avec le profil bas adopté par Shell dans son pays d’origine, les Pays-Bas. Une forte mobilisation populaire a permis d’y obtenir un moratoire de fait sur la fracturation hydraulique. (...)

Fracturer grâce aux failles juridiques et politiques

L’accord d’exploitation de Shell en Ukraine a été conclu avec le président Viktor Yanukovych, chassé par la rue fin 2013. La multinationale néerlandaise est associée, pour ce contrat, avec une firme ukrainienne appelée Nadra Yuzivska, propriété à 90% de l’État ukrainien et à 10% d’une société boîte aux lettres liée au clan de l’ancien président, suspecté de corruption. Un arrangement qui ne plaît évidemment pas au nouveau régime ukrainien. Shell a d’ailleurs dû cesser toutes ses opérations en Ukraine en juin, la zone de forage étant située dans l’Est du pays, à l’endroit même où se déroulent actuellement les affrontements entre l’armée ukrainienne et les séparatistes.

En Algérie et en Tunisie, les gouvernements ont choisi de favoriser l’extraction des gaz de schiste sans véritable débat public, malgré les réticences des scientifiques et de la population. Dans les deux pays, Shell est aux premières loges [4]. (...)

Shell met à profit les lacunes juridiques ou les conflits entre administrations pour forer dans des zones naturelles protégées (lire notre article). Les habitants traditionnels de ces concessions ne disposent pas de titres formels sur la terre. Et l’entreprise fait comme s’ils n’existaient pas (...)

L’eau, objet de toutes les inquiétudes

La plupart des régions où Shell cherche du gaz de schiste ont un point commun : elles manquent d’eau. Le Karoo en Afrique du Sud, la province de Neuquén en Patagonie argentine, l’Algérie et la Tunisie sont des régions extrêmement sèches. Les faibles ressources en eau sont vitales pour la population et les activités agricoles existantes. Or la fracturation hydraulique requiert d’énormes quantités d’eau : plusieurs millions de litres par forage. De quoi s’interroger sur la manière dont Shell et ses consœurs comptent procéder. Elles entretiennent d’ailleurs un flou artistique sur le sujet, tout en assurant qu’elles n’utiliseront jamais de sources d’eau servant à l’approvisionnement en eau potable ou à l’irrigation. (...)