
La guerre intérieure meurtrière que connaît depuis deux ans l’Éthiopie a fait plus d’un demi-million de morts, selon des estimations internationales. Cette guerre passe encore trop souvent sous les radars médiatiques et émeut peu la communauté internationale.
(...) Devant cette tragique situation, Madeleine Abraham interpelle frontalement le lecteur dans les pages du Guardian : “Vous pensez que la guerre en Ukraine est le conflit le plus meurtrier au monde ? Détrompez-vous”, écrit l’autrice britannique dont la famille est originaire de la région séparatiste éthiopienne du Tigré, théâtre principal de la guerre civile qui ravage le pays.
Un “nettoyage ethnique” invisible (...)
Évoquant le conflit, Madeleine Abraham note : “Les victimes ont été témoins de violations choquantes des droits de l’homme et, tragiquement, des civils ont été délibérément pris pour cible. Des dizaines de milliers de femmes ont été violées. Cela a duré deux ans et se produit aujourd’hui, mais il y a de fortes chances que vous ne sachiez même pas où cela se trouve. Bien qu’elle soit bien plus meurtrière que la guerre en Ukraine, les médias occidentaux l’ont pour la plupart ignorée.” (...)
Lire aussi :
(Amnesty International)
– Éthiopie : neuf choses à savoir sur le conflit au Tigré
Exécutions sommaires, viols collectifs, pillages... Depuis 2020, le conflit en Éthiopie a fait des milliers de victimes. Tandis que la situation s’enlise, des dizaines de milliers de personnes ont fui les combats, et la famine s’étend. Retour sur une guerre ignorée avec l’éclairage de Fisseha Tekle, l’un de nos chercheurs spécialisés sur l’Éthiopie depuis plus de quinze ans. (...)
L’Éthiopie est un État fédéral de 115 millions de personnes. La possibilité de faire sécession est inscrite dans la Constitution fédérale éthiopienne. Par ailleurs, c’est l’un des seuls pays du continent africain, avec la Gambie, à n’avoir jamais été colonisé : il représente un symbole important pour toute l’Afrique. (...)
Le conflit en Éthiopie a officiellement démarré dans la nuit du 3 au 4 novembre 2020. Le gouvernement éthiopien a accusé les forces du Front de libération des peuples du Tigré (TPLF en anglais) d’avoir attaqué l’armée fédérale éthiopienne basée au Tigré, et a décidé de lancer une offensive dans cette région.
En réalité, les tensions politiques dataient de bien avant. Lorsque le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed est arrivé au pouvoir, en avril 2018, les autorités régionales du TPLF [qui ont dominé la vie politique pendant près de trente ans, ndlr] lui ont reproché de les avoir écartées du pouvoir et de marginaliser la minorité tigréenne du pays. De son côté, le gouvernement accusait le TPLF de soutenir des forces d’oppositions, favorisant les tensions dans le pays.
En 2020, en raison de la pandémie de coronavirus, le gouvernement fédéral a reporté à deux reprises des élections qui devaient se tenir au printemps. Mécontents, les leaders du TPLF ont décidé d’organiser leurs propres élections, en septembre 2020, élections dont ils sont sortis vainqueurs. Ce scrutin a été jugé illégal par le pouvoir fédéral, qui a annoncé dans la foulée une suspension des fonds fédéraux pour la région. À partir de là, tout le monde s’est préparé à la guerre… (...)
2. Qui sont les principaux acteurs de ce conflit ?
Le conflit, qui a éclaté en novembre 2020, oppose en premier lieu le gouvernement fédéral éthiopien au gouvernement régional du Tigré. Mais il a ravivé d’anciennes querelles et de nombreux d’acteurs s’y sont greffés. (...)
3. Quels sont les moments clés du conflit ?
En novembre 2020, le gouvernement fédéral et ses alliés ont lancé une offensive pour prendre le contrôle du Tigré. Les combats ont fait des milliers de morts et des centaines de milliers de déplacés. Ils ont plongé le nord du pays dans une profonde crise humanitaire. Durant cette offensive, nous avons répertorié de nombreuses violations des droits humains touchant les civils (...)
4. Quelle est la situation humanitaire aujourd’hui dans le pays ?
Avant la guerre, une partie de la population avait déjà besoin d’une aide humanitaire. Mais ce besoin a littéralement explosé. Avec l’arrêt de l’activité agricole durant toute la durée des combats et la sécheresse qui sévit dans la région ces dernières années, la famine menace. (...)
(RFI)
– En Éthiopie, deux ans d’une guerre sanglante
Deux ans après le déclenchement de l’une des guerres les plus sanglantes de ces dernières années, un accord de « cessation des hostilités » a été signé entre le gouvernement éthiopien et les autorités du Tigré, dirigées par le TPLF, le parti qui dominait le pouvoir à Addis-Abeba jusqu’en 2018 et l’arrivée du Premier ministre Abiy Ahmed. Retour sur ces 24 mois de conflit ayant fait à ce jour, selon une estimation, 200 000 victimes militaires et 500 000 victimes civiles. (...)