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Non-fiction
Histoire d’un « précaire »
Article mis en ligne le 22 mars 2016
dernière modification le 19 mars 2016

Mustapha Belhocine raconte sa vie de précaire, cette « succession chaotique d’emplois à plein temps qui ont accompagné sa formation d’apprenti sociologue » dans ce que l’éditeur qualifie de « textes reliés », une collection, « Cent mille signes », « conçue pour redonner ses lettres de noblesse à la brochure, au livret, à l’opuscule » dans un monde où l’écrit est toujours plus recouvert par des « images à courte vue ». Ce livre est une « révision littéraire » de ce qui fut son mémoire de sociologie.

Un texte littéraire : les limites de la sociologie.

Au détour d’un paragraphe, Mustapha Belhocine fait référence à Gérard Mauger, sociologue, dont il se fait une joie, au milieu de ses déambulations entre Pôle Emploi et de candidatures auprès d’entreprises en quête de main d’œuvre aux profils soumis, de suivre le Séminaire. Qui est Gérard Mauger ? Un sociologue qui en appelle à la pratique de terrain. On ne peut ressaisir qu’une partie du sens de ce livre sur la précarité, si on le réduit à une simple compilation d’anecdotes, sans y voir aussi une réflexion sur la méthode sociologique et ses limites. « De terrain » ne signifie pas déployer l’art du camouflage, écrit Gérard Mauger dans un article publié dans la revue Genèses, « Enquêter en milieu populaire ». :

« À la limite, l’enquêteur, comme les "taupes" des services secrets, se forge méthodiquement une fausse identité, un curriculum vitae satisfaisant, une apparence physique adéquate, apprend à imiter l’accent indigène, etc. On connaît l’expérience de J. H. Griffin , romancier américain métamorphosé en Noir pendant six semaines dans le sud des États-Unis à la fin des années 1950 ou, plus récemment, celle de G. Wallraff , déguisé pendant plusieurs mois en ouvrier turc en RFA. (...)

Les divers visages du capitalisme.

Mustapha Belhocine nous promène de Pôle Emploi à ses rendez-vous où tests, QCM, questions de culture générale s’enchaînent pour décrocher un emploi. On découvre le staff de Mickey, la pseudo-égalité avec les « boss », l’infantilisation de la formation et la réalité crue de l’envers du décor. Chez Disney, il doit balayer en silence le moindre grain de pop-corn. Injonction lui est faite de se taire. Se rapprocher des clients ou de ses collègues est sanctionné, rendant ainsi impossible toute velléité de contestation. Disney contrôle tout…jusqu’aux poils sur le menton. Certains emplois réduisent les hommes et les femmes à l’état animal. Cet esclavagisme et la défiguration de l’humain nous renvoient aux pires moments du XIXe siècle. (...)