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Hôpital bombardé par l’Arabie Saoudite et ses alliés : cessons de leur vendre des armes
Article mis en ligne le 2 novembre 2015

Après le bombardement de l’hôpital de Kunduz, en Afghanistan, le 3 octobre dernier, un autre établissement de Médecins Sans Frontières vient d’être touché par des frappes aériennes au Yémen. Que s’est-il passé ? Pourquoi les autorités internationales ne prennent-elles pas de mesures ? Pour Geneviève Garrigos, présidente d’Amnesty International France, il y a urgence.

Tout indique que cette attaque était délibérée et constituerait un crime de guerre au regard du droit humanitaire international qui précise clairement que les installations civiles, les centres de soins et les hôpitaux ne peuvent être pris pour cibles tant qu’ils ne participent pas aux opérations militaires.

Depuis mars, les civils subissent des frappes délibérées

Or, selon MSF, ni l’hôpital d’Haydan ni celui de al Shara, à Razih, qui a lui aussi été pris pour cible pour des frappes le 4 septembre dernier tuant six patients et en blessant six autres, n’étaient utilisés à des fins militaires. Quant aux sept blessés du raid d’Haydan, il a fallu attendre le lendemain pour les évacuer vers l’hôpital de Saada, les convois de civils et les ambulances étant eux-mêmes bombardés.

De fait, depuis qu’en mars de cette année la coalition a lancé une campagne de frappes aériennes en soutien aux forces gouvernementales du président Abd Rabo Mansour Hadi contre les rebelles Houthis et leurs alliés, les civils subissent des frappes délibérées et sont les premières victimes du conflit qui s’est étendu à tout le pays.

Dans le nord, les villes de Saada et de Marran, où vivent des dizaines de milliers de civils, ont été désignées comme des cibles militaires et de nuit comme de jour la population n’est plus à l’abri de bombardements qui ont déjà tué des centaines de civils, principalement des enfants.

Saada est à présent en ruine, la majeure partie de la population est partie et les maisons, les commerces, les marchés et les bâtiments publics ne sont plus que des tas de décombres. Dans un conflit, les "bavures", les "erreurs" existent, mais au Yemen, depuis sept mois rien n’indique que des mesures soient prises pour y mettre fin.

Des crimes de guerre perpétrés dans la plus grande indifférence

Au contraire, et l’attaque d’Haydan est là pour nous le rappeler, des crimes de guerre continuent d’être perpétrés dans la plus grande indifférence au niveau international.

Ces preuves accablantes et répétées doivent conduire à une enquête indépendante et internationale et à l’arrêt immédiat de tout transfert d’armes vers l’Arabie Saoudite et les autres membres de la coalition, en particulier des avions et des hélicoptères de combat et les composants et pièces détachées associés.

Certes, les États-Unis sont pointés du doigt, mais tous les pays exportateurs d’armements sont tenus de respecter le traité sur le commerce des armes (TCA) entré en vigueur en décembre 2014, dès lors qu’ils l’ont ratifié.

Au terme de son article 6 (Interdictions), ils ont obligation de n’autoriser aucun transfert d’armes classiques s’ils ont connaissance, lors de l’autorisation, que celles-ci pourraient servir à commettre un génocide, des crimes contre l’humanité, des violations graves des Conventions de Genève de 1949, des attaques dirigées contre des civils ou des biens de caractère civil.

Au–delà de toute interdiction, ils ont l’obligation d’évaluer chaque transfert envisagé afin qu’ils s’assurent que les armements considérés ne puissent pas servir à commettre ou faciliter des violations graves des droits humains et du droit international humanitaire.

Les armes ne sont pas une marchandise comme les autres

Des obligations qui s’imposent à la France qui a ratifié le TCA en avril 2014 et dont l’Arabie Saoudite est devenue, ces dernières années, le premier acheteur d’armement français. Passant d’un peu plus de 500 millions d’euros en 2012 à plus de 3,5 milliards en 2014.

Toutefois, les livraisons et les ventes d’armes alimentent un marché florissant qui ne concerne pas que l’Arabie Saoudite. D’autres membres de la coalition font aussi partie du club des clients privilégiés de la France sur le marché des armes (top 20) : le Qatar, l’Egypte, les Emirats Arabes Unis, le Maroc et les tournées au Moyen orient que ce soit de François Hollande ou de Manuel Valls annoncent des prises de commandes record.

Les armes ne sont pas une marchandise comme les autres, c’est la raison même du TCA, or si l’objectif de la France serait avant tout économique, lutter contre le chômage, le gouvernement et les parlementaires ne peuvent continuer d’ignorer les crimes de guerre commis par l’Arabie Saoudite et ses alliés au Yémen.

Ils ne peuvent continuer à mettre dans les plateaux de la balance d’un côté les intérêts économiques, de l’autre des vies humaines et leur engagement internationaux.