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La vie des idées
Humaniser la guerre ?
#guerres #terrorisme
Article mis en ligne le 17 janvier 2023
dernière modification le 16 janvier 2023

Les guerres entreprises contre le terrorisme ne font guère que renforcer l’instabilité internationale. Mais si ce scandale n’éclate pas aux yeux, c’est qu’elles se parent d’une prétention à l’humanisation, qui conduit dans les faits à abandonner toute perspective de paix.

À la suite des attentats de septembre 2001, les États-Unis interviennent en Afghanistan au nom de la « guerre contre le terrorisme ». Les opérations militaires qu’ils y mènent ont des effets politiques déstabilisants et ne permettent pas d’empêcher le retour des Talibans. Les troupes étatsuniennes resteront tout de même engagées dans ce pays une vingtaine d’années. Le champ de bataille antiterroriste est par ailleurs étendu au Pakistan, à la Somalie et au Yémen, où les attaques de drones tuent ponctuellement des civils. En 2003, les États-Unis envahissent aussi l’Irak. Environ 200 000 civils ont péri après le lancement de l’opération « Iraqi Freedom ». Certes, une minorité de ces civils ont été directement tués par les militaires étatsuniens. Il n’en reste pas moins que leurs décès sont liés à l’instabilité politique résultant de l’action des États-Unis. De plus, le chaos provoqué a fait le lit de l’État islamique.

À la lumière de ces éléments, on peut se demander pourquoi le recours à la force armée n’a pas davantage été remis en question aux États-Unis ces dernières années. La thèse de Samuel Moyn est que les États-Unis ont produit une représentation « humanisée » de la violence militaire qui a eu pour effet de canaliser la critique de la guerre sur des questions, certes importantes, mais relativement techniques. L’auteur montre que cette représentation, construite à travers des références au droit international humanitaire (jus in bello), trouve son origine en Europe et aux États-Unis au XIXe siècle. Il attire l’attention sur les limites de ce projet d’humanisation ainsi que sur les illusions qu’il charrie. Plus encore, il remarque que l’humanisation de la guerre n’incite pas les décideurs politiques à rechercher activement et les opinions à exiger la paix, ce qui explique pourquoi certaines guerres sont devenues « sans fin ». Selon lui, la guerre « humanisée » conduit à l’abandon de la paix comme objectif politique. (...)