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« Il n’y a pas de crise mondiale de l’eau »
Asit K. Biswas est conseiller de six Directeurs d’agences des Nations Unies et des gouvernements de 17 pays, il a reçu en 2006 le Stockholm Water Prize
Article mis en ligne le 10 avril 2015

L’Unesco publie aujourd’hui (20 mars) son rapport sur la situation mondiale de l’eau. Mais la dramatisation du problème passe à côté de la plaque. Pour un des meilleurs experts du sujet, Asit Biswas, le problème n’est pas la pénurie d’eau mais la mauvaise gestion des eaux existantes. En arrêtant le gaspillage, « on peut augmenter la quantité réellement disponible de moitié sans eau et sans terres supplémentaires. »

À quelques mois de l’adoption par les Nations Unies des nouveaux Objectifs de développement durable, le Rapport mondial annuel des Nations Unies sur la mise en valeur des ressources en eau, publié le 20 mars 2015 à New Delhi (Inde), à l’occasion de la Journée mondiale de l’eau, conclut qu’il n’est pas possible de continuer à utiliser l’eau au rythme actuel.

Le rapport, intitulé L’eau pour un avenir durable, pointe la hausse de la demande - elle devrait augmenter de 55 % d’ici 2050 - , la pollution et la surexploitation des réserves souterraines, et la mauvaise gouvernance.

Le changement climatique devrait encore accentuer cette pression, causant une plus forte évaporation. Par ailleurs, l’élévation du niveau de la mer risque aussi d’affecter les eaux souterraines des zones côtières. Conclusion du rapport : nous devons changer notre façon d’évaluer, de gérer et d’utiliser cette ressource qui conditionne notre avenir. (...)

Le premier problème n’est pas le manque d’eau mais la gestion des ressources. « Inutile de paniquer sur la quantité d’eau, dit-il, ce n’est qu’une perte de temps et de moyens qui pourraient être utilisés pour résoudre le véritable problème, faire parvenir l’eau aux populations qui en ont besoin. » (...)

La question fondamentale est de savoir comment nous gérons nos eaux usées pour pouvoir les utiliser et les réutiliser, ce que fait Singapour. Cette ville dispose de 35 à 40 mètres cubes par personne, par an, et ils n’ont aucun problème d’eau. C’est une question d’efficacité. (...)

Le problème le plus important concernant l’eau n’est pas la pénurie

Que ce soit dans les pays développés ou dans les pays en développement, il n’y a pas réellement de pénurie d’eau. Le problème est le manque d’infrastructures, et plus important encore, l’absence de gestion. (...)

les gestionnaires du Service de l’eau ne restent en général pas plus de trente mois à leur poste. Et ils ne sont ni experts en ce qui concerne l’eau, ni experts en gestion. Leurs seules qualifications sont leurs bonnes relations avec le Maire. Si vous mettez ce type de personnes dans la position de gérer l’eau, ils regardent ce qui se passe et ils voient un problème horrible auquel ils ne comprennent pas grand chose.

Alors, ils espèrent et ils prient que rien de grave ne se passera pendant qu’ils sont responsables du service, et ils laissent les problèmes à leur successeur. Tout cela n’a rien à voir avec l’eau. Mais ils continuent à répéter que nous manquons d’eau. Ce qui est faux. (...)

même dans les bidonvilles des pires villes les gens ont accès à l’eau, mais elle n’est pas propre, ils la paient très cher, et l’approvisionnement n’est pas régulier. La question est de leur donner un meilleur service, à un coût beaucoup plus faible et une régularité d’approvisionnement meilleure. Mon point de vue est que tous les trois sont possibles (...)

La première chose est d’arrêter le gaspillage

C’est la même chose qu’avec la nourriture. Aux États-Unis, 27 % de la nourriture est gâchée, que ce soit dans les magasins, les familles ou les restaurants. 27 % qui va à la poubelle. Dans le monde en développement, c’est encore pire.

L’année dernière, le ministre indien de l’Agriculture a reconnu publiquement qu’un peu plus de 50 % des fruits et légumes produits en Inde n’atteignent jamais le consommateur. Pourquoi ? Parce que la chaîne d’approvisionnement est mauvaise. Manque de réfrigération, mauvaises conditions de transport. (...)