
Depuis sa cellule, Nasrin Sotoudeh écrit : « Militants des droits humains ! En pleine crise du coronavirus, qui touche l’Iran et le monde, les conditions des prisonniers politiques sont devenues si difficiles que leur détention ne peut plus continuer avec tant d’oppression. » L’avocate, infatigable défenseure des persécutés, livre ensuite une courte plaidoirie en faveur de ceux et celles qui, comme elle, sont enfermés au terme de procédures douteuses sans recours, ni sans droit. Ce courrier qui a réussi à sortir de sa geôle se termine par ces mots : « Je commence une grève de la faim et exige la libération des prisonniers politiques. Dans l’espoir d’établir la justice dans mon pays, l’Iran. »
(...) Nasrin Sotoudeh connaît aussi bien le système judiciaire iranien que la prison (...)
« Conspiration contre le système », insulte contre Guide suprême, incitation à la prostitution, entre autres : 38 ans de prison (seule la peine la plus lourde, dix ans, doit être effectuée), et même 148 coups de fouets.
Depuis, Nasrin Sotoudeh, 57 ans, est détenue à Evin, la prison de sinistre réputation du nord de Téhéran, où sont détenus les prisonniers politiques. Elle partagerait une immense cellule avec une quarantaine d’autres femmes, dont l’anthropologue franco iranienne Fariba Adelkhah, condamnée à cinq ans de prison en appel fin juin, au terme d’une procédure là encore opaque, vigoureusement dénoncée par ses soutiens et la diplomatie française. Une autre étrangère, la jeune chercheuse australo-britannique Kylie Moore-Gilbert, vient d’être secrètement transférée à Ghartchak, une prison isolée du centre du pays, l’une des plus surpeuplées et des plus redoutables, surtout au temps du Covid. (...)
« La situation est très dangereuse dans les prisons, entre autres à cause du Covid. Des centaines de prisonniers sont détenues à Evin, souvent dans des conditions d’hygiène précaire », s’alarme Karim Lahidji, de la Ligue pour la défense des droits humains en Iran. Ce camarade de route de Nasrin Sotoudeh se dit « très, très inquiet de la santé » de sa consœur emprisonnée désormais en grève de la faim. « Ce n’est pas la première fois que Nasrin Sotoudeh décide de mettre sa vie et sa santé en danger pour faire passer un message », rappelle-t-il. La dernière arme d’un long combat.