
Les organisateurs leur promettent que les grands projets urbains prévus pour les Jeux olympiques auront des retombées économiques et sociales sur leur département. Les habitants de Saint-Denis, eux, craignent que ces infrastructures – dont le centre aquatique olympique – ne bénéficient pas à la population locale. Et se mobilisent.
La ville de Paris a été sélectionnée, en septembre 2017, pour recevoir l’édition 2024 des Jeux olympiques et paralympiques. Dans sa candidature, la capitale s’était engagée à organiser des Jeux peu coûteux et durables. Pour cela, elle compte s’appuyer essentiellement sur des équipements déjà existants. Les seules nouvelles infrastructures directement liées aux JO seront réalisées en Seine-Saint-Denis : le centre aquatique olympique à Saint-Denis, le village olympique à cheval sur les communes de Saint-Denis, de l’Île-Saint-Denis et de Saint-Ouen et le village des médias à proximité du Parc des expositions au Bourget et à Dugny.
Les habitants de ce département, où trois habitants sur dix sont pauvres, doutent que l’argent investi améliore leur quotidien
Les organisateurs promettent que cela aura des retombées économiques et sociales sur ce département où trois habitants sur dix vivent au-dessous du seuil de pauvreté. Mais certains, dans les localités concernées, s’inquiètent déjà de la tournure que prend le projet. Notamment à Saint-Denis, où dès 2017, un collectif rassemblant différentes associations des territoires concernés a été monté, le Comité de vigilance citoyen JO 2024. « Nous sommes indépendants des partis politiques, et ne nous positionnons pas pour ou contre les JO », précise Cécile Gintrac, habitante de Saint-Denis, géographe et membre du collectif. Pour ces citoyens, il s’agit surtout de veiller à ce que l’argent investi dans les JO, dont 1,5 milliard d’euros d’argent public, permette réellement d’améliorer les conditions de vie sur place. Ce dont ils doutent pour le moment.
Le centre aquatique doit être construit dans le sud de Saint-Denis, à proximité du Stade de France. Une zone aux airs de quartier d’affaires, où siègent de grandes entreprises telles qu’Orange ou Vente privée, mais où les riverains souffrent depuis des années des « coupures urbaines » qui maillent leur territoire (...)
Depuis plusieurs années, différents groupes d’habitants se battent pour que l’A1, cette « fichue autoroute » comme ils l’appellent, soit recouverte, de la même manière qu’entre la Porte de la Chapelle et le Stade de France. Réunis au sein du Collectif pour l’enfouissement de l’A1, ils ont imaginé un projet alternatif qui permettrait de recouvrir la route entre Saint-Denis et la Courneuve, avec captation et retraitement des effluents. « Pour maintenant, on sait que ça ne se fera pas avant les JO, mais on milite pour que la promesse soit tenue de le faire après 2024 », explique Georges Salomon, ancien habitant de Saint-Denis et président du comité. (...)
« Dans leur communication, les organisateurs des JO parlent d’excellence démocratique, mais sur le terrain c’est autre chose », constate Benjamin Darras. Les concertations publiques, organisées autour des différents projets liés aux JO ou aux mutations des quartiers concernés, à destination de la population, ont peu mobilisé. Il faut dire que les dossiers sont techniques, « des milliers de pages ». Et ceux qui ont assisté aux réunions ont eu le sentiment qu’on leur présentait des projets déjà ficelés. « Dans les réunions, il y avait plus d’entreprises privées qui venaient se renseigner que d’habitants de Saint-Denis », explique Cécile Gintrac. (...)
« On détruit et on reconstruit sans consulter les habitants »
Le Comité de vigilance citoyen JO 2024 a organisé une réunion publique au début du mois de mars. Une centaine de personnes étaient présentes, soit bien plus que lors des concertations publiques. Les habitants étaient invités à prendre la parole, et beaucoup ont exprimé des inquiétudes. (...)
D’autres vont plus loin, comme Frédéric Viale, du collectif « Non aux JO 2024 », qui propose lui un « référendum local autoorganisé » et garde l’espoir de faire annuler l’événement.
Une chose est sûre : ce sujet sera l’un des enjeux des municipales de 2020, à Saint-Denis, mais également dans les autres villes concernées. (...)