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Le Grand Soir
Julian Assange doit être libéré, pas trahi
Article mis en ligne le 19 février 2020

Le 24 février, lorsque Julian Assange entrera au tribunal de la Couronne de Woolwich, le véritable journalisme sera le seul crime jugé.

Ce samedi, il y aura une marche de l’Australia House à Londres vers Parliament Square, le centre de la démocratie britannique. Les gens porteront des portraits de l’éditeur et journaliste australien Julian Assange qui, le 24 février, sera confronté à un tribunal qui décidera s’il doit ou non être extradé vers les États-Unis où il sera comme un mort vivant. (...)

En tant que l’une des plus anciennes "missions diplomatiques" du Royaume-Uni, cette relique de l’empire offre une sinécure agréable aux hommes politiques des Antipodes : un "compagnon" récompensé ou un fauteur de troubles exilé.

Connu sous le nom de Haut Commissaire, l’équivalent d’un ambassadeur, le bénéficiaire actuel est George Brandis, qui, en tant que procureur général, a tenté d’édulcorer la loi australienne sur la discrimination raciale et a approuvé des raids contre des lanceurs d’alerte qui avaient révélé la vérité sur l’espionnage illégal de l’Australie au Timor oriental lors des négociations pour le partage du pétrole et du gaz de ce pays appauvri.

Cela a conduit à la poursuite des lanceurs d’alerte Bernard Collaery et "Witness K", sous de fausses accusations. Comme Julian Assange, ils doivent être réduits au silence dans un procès kafkaïen et mis en prison.

L’Australia House est le point de départ idéal pour la marche de samedi.

Au service du grand jeu

"J’avoue", écrivait Lord Curzon, vice-roi de l’Inde, en 1898, "que les pays sont des pièces sur un échiquier sur lequel se joue un grand jeu pour la domination du monde".

Nous, Australiens, sommes au service du Grand Jeu depuis très longtemps. Ayant dévasté notre peuple indigène lors d’une invasion et d’une guerre d’usure qui se poursuit encore aujourd’hui, nous avons versé le sang de nos maîtres impériaux en Chine, en Afrique, en Russie, au Moyen-Orient, en Europe et en Asie. Aucune aventure impériale contre ceux avec qui nous n’avons pas de querelle n’a échappé à notre dévouement.

Le mensonge a été un trait caractéristique. (...)

WikiLeaks n’a pas été le premier à dénoncer le modèle de mensonge criminel dans les démocraties qui restent aussi rapaces qu’au temps de Lord Curzon. La remarquable organisation d’édition fondée par Julian Assange a réussi à en apporter la preuve.

Les vrais mensonges exposés

WikiLeaks nous a informés sur la façon dont les guerres illégales sont fabriquées, sur la façon dont les gouvernements sont renversés et la violence est utilisée en notre nom, sur la façon dont nous sommes espionnés via nos téléphones et nos écrans. Les véritables mensonges des présidents, des ambassadeurs, des candidats politiques, des généraux, des mandataires, des fraudeurs politiques ont été révélés au grand jour. Un par un, ces aspirants empereurs ont réalisé qu’ils étaient nus.

Il s’agit d’un service public sans précédent ; c’est avant tout un journalisme authentique, dont la valeur peut être jugée par le degré d’apoplexie des corrompus et de leurs apologistes.

Par exemple, en 2016, WikiLeaks a publié les courriels divulgués du directeur de campagne d’Hillary Clinton, John Podesta, qui ont révélé un lien direct entre Clinton, la fondation qu’elle partage avec son mari et le financement du djihadisme organisé au Moyen-Orient - le terrorisme.. (...)

Un courriel a révélé que l’État islamique (ISIS) était financé par les gouvernements d’Arabie Saoudite et du Qatar, dont Clinton a accepté d’énormes "dons". De plus, en tant que secrétaire d’État américaine, elle a approuvé la plus grande vente d’armes au monde à ses bienfaiteurs saoudiens, d’une valeur de plus de 80 milliards de dollars. Grâce à elle, les ventes d’armes américaines au monde entier - destinées à des pays sinistrés comme le Yémen - ont doublé.

Révélés par WikiLeaks et publiés dans le New York Times, les e-mails de Podesta ont déclenché une campagne virulente contre le rédacteur en chef Julian Assange, sans preuves. Il était un "agent de la Russie travaillant à l’élection de Trump" ; le "Russiagate" absurde a suivi. Le fait que WikiLeaks ait également publié plus de 800 000 documents souvent accablants en provenance de Russie a été ignoré. (...)

Lorsque nous parlons de dictatures, nous appelons cela un lavage de cerveau : la conquête des esprits. C’est une vérité que nous appliquons rarement à nos propres sociétés, quelle que soit la traînée de sang qui remonte jusqu’à nous et qui ne sèche jamais.

WikiLeaks a mis cela en évidence. C’est pourquoi Assange se trouve dans une prison de haute sécurité à Londres et fait face à des accusations politiques concoctées en Amérique, et c’est pourquoi il a fait honte à tant de ceux qui ont payé pour que les choses soient claires. Regardez ces journalistes qui cherchent maintenant une couverture alors qu’ils se rendent compte que les fascistes américains qui sont venus pour Assange pourraient venir pour eux, notamment ceux du Guardian qui ont collaboré avec WikiLeaks et ont gagné des prix et obtenu des contrats lucratifs pour des livres et des films hollywoodiens basés sur son travail, avant de se retourner contre lui.

En 2011, David Leigh, le "rédacteur en chef des enquêtes" du Guardian, a déclaré aux étudiants en journalisme de la City University de Londres qu’Assange était "assez dérangé". Lorsqu’un étudiant perplexe lui a demandé pourquoi, Leigh a répondu : "Parce qu’il ne comprend pas les paramètres du journalisme conventionnel".

Mais c’est précisément parce qu’il a compris que les "paramètres" des médias protégeaient souvent des intérêts politiques et acquis et n’avaient rien à voir avec la transparence que l’idée de WikiLeaks était si attrayante pour de nombreuses personnes, en particulier les jeunes, cyniques à juste titre à l’égard de ce qu’on appelle le "courant dominant".

Leigh se moquait de l’idée même qu’une fois extradé, Assange finirait par "porter une combinaison orange". Ce sont des choses, a-t-il dit, "que lui et son avocat disent pour nourrir sa paranoïa". (...)

L’année dernière, quand on a interrogé l’actuel Premier ministre, Scott Morrison, un ancien homme de relations publiques, sur Assange, il a répondu comme à son habitude : "Il devra faire face à son destin !"

Lorsque la marche de samedi atteindra les Chambres du Parlement, dite "la Mère des Parlements", Morrison et Gillard et Turnbull et tous ceux qui ont trahi Julian Assange devraient être interpellés ; l’histoire et la décence ne les oublieront pas, ni ceux qui se taisent aujourd’hui.

Et s’il reste un peu de sens de la justice dans le pays de la Grande Charte, la parodie qu’est le procès contre cet héroïque Australien doit être rejetée. Sinon, gare à nous, gare à nous tous. (...)

La marche du samedi 22 février commence à l’Australia House à Aldwych, Londres WC2B 4LA, à 12h30 : rassemblement à 11h30.