À l’heure où Manuel Valls poursuit l’abjecte politique de « démantèlement des camps de roms » de ses prédecesseurs Hortefeux et Guéant, il nous a paru utile de publier le chapitre édifiant qu’a consacré le collectif Cette France-là à la discrimination et à la violence étatique que subissent, en France de manière particulièrement spectaculaire et brutale, mais plus largement dans toute la « Communauté européenne », des populations qu’en bonne logique, on accuse en même temps de tous les maux.
Environ un quart des Européens seraient mal à l’aise à l’idée d’avoir un Rom pour voisin. À titre de comparaison, seuls 6% ne seraient pas à l’aise vis-à-vis d’un voisin d’une origine ethnique différente en général [1].
Surnommés Tsiganes, Bohémiens, Gitans, Romanichels, mais se nommant eux-mêmes de préférence Roms ou Rroms [2], Manouches, Sintés, Kalés, et Gitans dans le sud de l’Europe, ils seraient, d’après l’European Roma Rights Center, entre 12 et 15 millions sur le continent européen, et entre 7 et 9 millions dans l’Union européenne. Les multiples noms qui les désignent illustrent la diversité des groupes qui, selon les régions où ils se sont fixés en Europe, ont connu des histoires très différentes. Cette diversité traduit aussi la difficulté qu’ont les Européens à appréhender un peuple qui n’avait pas, jusque dans les années 1970 [3], de terme global pour s’identifier, tout au moins selon les critères des États nations. (...)
Un peuple sans État de référence donc, ni ambassades pour entrer en négociation avec les autorités administratives. Aujourd’hui encore, les Roms sont partagés entre l’affirmation du droit de citoyenneté individuel, à l’intérieur de chaque nation, et le principe d’une reconnaissance collective en tant que minorité nationale dans toute l’Europe [5].
Le mot rom signifie « homme ». La seule dénomination partout reconnue par eux est celle des gadgés, terme qui désigne tous ceux qui ne sont pas roms. Outre cette identification négative, ils se réclament surtout de l’appartenance à tel ou tel groupe familial, ainsi que d’une complexe structure de liens de parenté. Présents depuis des siècles dans les différents pays européens, c’est la force de leur organisation sociale qui leur a permis de résister à toutes les tentatives d’intégration, et plus encore de rejet, de la part des sociétés environnantes.
Car leur existence n’a cessé au cours des siècles de soulever méfiance, hostilité, mais aussi fantasmes (...)