
À 85 ans, le Sud-Africain ne craint pas de prendre la doxa religieuse à rebrousse poil. Il se déclare favorable à l’euthanasie active et au suicide assisté. Et veut pouvoir choisir les conditions de sa mort.
Desmond Tutu a toujours été des justes combats. Or, depuis qu’il a déclaré, ce mois-ci, qu’il revendiquait le droit de décider de lui-même « quand et comment mourir », le prix Nobel de la Paix est en porte-à-faux avec la doxa chrétienne. L’archevêque sud-africain vient peut-être de perdre sa place au paradis.
Mais Tutu s’en fiche. Il y a deux ans déjà, il avait expliqué qu’il était favorable au suicide assisté. La question fait toujours débat dans la plupart des pays, le Pape et la plupart des Eglises sont contre. Et voilà que le 7 octobre, le vieux compagnon de Nelson Mandela enfonce le clou. Dans une tribune publiée par le Washington Post, il revendique ce droit pour… lui-même.
Ce n’est pas un souhait vague et hypothétique. Desmond Tutu vient de souffler ses 85 bougies. Il sort de deux séjours en hôpital pour tenter d’y soigner les suites d’un cancer.
« Je me suis préparé à la mort, écrit-il, et je dis clairement que je ne souhaite pas être maintenu en vie à tout prix ».
Cette affirmation résulte de ses convictions profondes :
« En refusant le droit à la mort avec dignité, on oublie la compassion qui est au cœur des valeurs chrétiennes » précise-t-il, une sorte de pied-de-nez à ces hommes de Dieu qui pourraient le traiter d’hérétique.
Un homme libre
Bien sûr, le moment choisi n’est pas anodin : le débat est fort animé en Afrique du sud, la Cour suprême doit se prononcer en novembre 2016 sur la légalité de cette pratique, et Desmond Tutu apporte sa pierre au débat politique national. La contribution est importante ; il revendique en effet « The right to an assisted death ». Or le droit de chacun à une mort assistée, c’est bien plus que « l’euthanasie passive », votée par la France début 2016, durant laquelle on accompagne le patient en suspendant les traitements et en lui administrant des sédatifs jusqu’à la fin. (...)