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le monde diplomatique
L’art de la provocation
Article mis en ligne le 15 juin 2019

Un État qui, sans motif réel, dénonce un accord international de désarmement qu’il a longuement négocié peut-il ensuite menacer d’agression militaire un autre État signataire ? Peut-il ordonner à tous les pays de s’aligner sur ses positions capricieuses et belliqueuses, faute de quoi eux aussi subiront des sanctions exorbitantes ? Quand il s’agit des États-Unis, la réponse est « oui ».

En somme, il est parfaitement inutile de perdre son temps à étudier les raisons invoquées par la Maison Blanche pour justifier son escalade contre l’Iran. On imagine que M. John Bolton, conseiller à la sécurité nationale du président Donald Trump, et M. Michael Pompeo, secrétaire d’État, ont confié aux diplomates et aux services de renseignement américains une mission du genre : « Cherchez des prétextes, je me charge de la guerre. »

M. Bolton ne manque ni d’expérience ni de suite dans les idées. En mars 2015, alors que son fanatisme en faveur de l’invasion de l’Irak a amoindri son influence, il publie dans le New York Times une tribune intitulée : « Pour arrêter la bombe iranienne, il faut bombarder l’Iran ». Après avoir prétendu que Téhéran ne négocierait jamais la fin de son programme nucléaire, il conclut : « Les États-Unis pourraient effectuer un travail soigné de destruction, mais seul Israël peut faire ce qui est nécessaire. (…) L’objectif sera le changement de régime à Téhéran (1). »

Quelques mois plus tard, un accord nucléaire avec l’Iran était signé par toutes les grandes puissances, États-Unis compris. Selon l’Agence internationale de l’énergie atomique, Téhéran en a respecté scrupuleusement les termes. Pourtant, M. Bolton n’en démord pas. En 2018, devançant les positions va-t-en-guerre du gouvernement israélien et de la monarchie saoudienne, il tient toujours autant à son « changement de régime » : « La politique officielle des États-Unis, écrit-il alors, devrait être la fin de la révolution islamique iranienne avant son quarantième anniversaire. Cela laverait la honte d’avoir eu nos diplomates retenus comme otages pendant quatre cent quarante-quatre jours. Et ces anciens otages pourraient couper le ruban lors de l’inauguration d’une nouvelle ambassade à Téhéran (2). » (...)