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Les eaux glacees du calcul egoiste
L’avenir de l’eau. Ressource contre droit humain ?, par Riccardo Petrella
Article mis en ligne le 18 octobre 2012
dernière modification le 17 octobre 2012

Dans le cadre des travaux de l’annuelle Assemblée Générale de l’ONU qui s’est ouverte le 18 septembre dernier, les Ministres des affaires étrangères de plusieurs pays avaient préparé une rencontre spéciale sur la crise de l’eau, qui s’est déroulée du 23 au 29 septembre 2012. Mais les propositions en débat établissaient volontairement une opposition artificielle entre la protection, la conservation et le bon usage efficient et économique de la ressource en eau, considèrées comme absolument prioritaires - et le droit humain à l’eau, volontairement ignoré, voire considéré comme un faux problème et un obstacle à une bonne gestion de l’eau et à la solution de la crise mondiale de l’eau. Ce qui peut augurer d’une inquiétante inflexion des politiques de l’eau à l’échelle internationale.

(...) L’évènement méritait une attention particulière. A la base de cette rencontre se trouve le Conseil InterAction (IAC), un groupe de 40 anciens chefs d’État et de gouvernement, présidé par l’ex premier ministre canadien, Jean Chrétien. (1)

Or, l’IAC a confirmé dans un nouveau rapport (2) que la planète est confrontée à une crise de l’eau grandissante, et que l’impact futur de la rareté de l’eau pourrait être dévastateur. Dès lors, le groupe demandait, à juste titre, au Conseil de sécurité de se pencher spécifiquement sur la sécurité de l’eau, et de considérer la question de la ressource eau comme l’une des principales préoccupations de la communauté internationale.

Une initiative louable (3) s’il n’y avait pas un hic (...)

la marchandisation de l’eau et la libéralisation et la privatisation des services hydriques prennent une envolée rapide à travers le monde. La financiarisation s’en suit massivement (on ne compte plus, à partir de 2000, les fonds d’investissement spéculatifs internationaux spécialisés dans le secteur de l’eau).

Depuis, on travaille avec acharnement à la monétisation de l’eau en tant que telle (donner une valeur monétaire marchande aux fleuves, aux nappes, à l’eau de pluie, aux glaciers..) dans le cadre de la monétisation généralisée de la nature. (6)

L’approche économique devient omniprésente, elle s’impose en tant que norme, voire dogme. (...)

L’opposition entre « ressource » et « droit » appliquée à l’eau est tout simplement une escroquerie scientifique et politique. En réalité, les groupes sociaux dominants riches, ainsi que les grandes entreprises transnationales industrielles et commerciales, ne veulent pas partager la prise en charge du droit à la vie de tous les êtres humains et le droit du vivant de notre Planète.

Ce qui intéresse les industries informatiques et des télécommunications, dont les besoins en eau de très grande pureté sont considérables, c’est qu’elles puissent continuer à inonder le monde de iPad, iPhone, computers et téléphones mobiles.

Le fait qu’il y ait davantage de personnes ayant accès aux téléphones mobiles qu’aux toilettes ne constitue pas un problème, du moins pour elles, bien que l’on sache qu’on peut vivre sans iPad ou téléphones mobiles, alors que, d’après l’UNICEF, cinq mille enfants meurent chaque jour à cause de maladies dues au manque d’accès à l’eau.

De même, Coca-Cola s’inquiète de la pénurie croissante d’eau parce que l’eau est sa principale matière première et elle craint une aggravation de la crise de l’eau. (...)

Le même discours vaut pour Nestlé, Danone, Pepsi-Cola, Buitoni, Inbev, Monsanto, Syngenta, General Electric, Unilever, BASF ainsi que Alcoa, Rio Tinto (on sait que les industries minières figurent parmi les plus gros utilisateurs d’eau).

Même les compagnies d’assurance sont préoccupées par l’augmentation en nombre et intensité des catastrophes liées aux sécheresses et inondations.

Aucune de ces entreprises ne s’active dans le domaine de l’eau en raison d’une passion soudaine pour l’environnement, ou par souci de permettre à tout le monde d’avoir accès à l’eau. (...)