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L’étonnant combat de la commune de Dolus contre McDonald’s
Article mis en ligne le 31 janvier 2018

Depuis plusieurs années, McDonald’s cherche à s’installer sur l’île d’Oléron. Deux communes et plusieurs maires s’y sont successivement opposés. Alors qu’une décision de justice a donné raison à la multinationale du fast-food cet automne, l’opposition locale ne faiblit pas et le maire de Dolus a lancé une souscription pour payer les amendes de la justice

(...) dans le cœur de ce village de plus de 3.000 habitants, Marie amène ses enfants à l’école. « Je ne suis pas contre McDo, mais contre McDo à Dolus, déclare la trentenaire. Le maire a bien redynamisé le village : il y a du bio à la cantine, les petits commerçants marchent… ce n’est pas pour qu’une chaîne vienne casser tout ce travail. Il sait ce qu’il a en tête, et il est courageux, car il se met une partie de la population à dos. »

Depuis son élection comme maire de Dolus en 2014, Grégory Gendre a refusé deux permis de construire à McDonald’s France. Comme, avant lui, le maire de Saint-Pierre, autre commune insulaire. C’est que la multinationale rentre mal dans les projets de cet écologiste (non encarté), « du soutien à des pratiques agricoles destructrices jusqu’à l’évasion fiscale, en passant par le contournement du droit social pour ses salariés », rappelle-t-il. (...)

Né ici, d’abord journaliste économique, puis chargé de communication chez Greenpeace, il est revenu sur l’île en 2007 pour fonder Roule ma frite, une association qui récupère les huiles de friture pour faire tourner les moteurs des voitures. « On n’aime pas trop être contre, on préfère créer des choses : mettre 40 % d’alimentation bio et locale à la cantine, favoriser l’agriculture paysanne, etc. » se vante-t-il.

« Je préférerais conserver le patrimoine, les huîtres et le beurre »
Mais face aux demandes insistantes de McDo, l’élu, bien aidé par la mobilisation citoyenne, n’a pas cédé : « On a refusé leurs permis de construire sur la base des règles d’urbanisme. D’abord, ils annoncent une affluence de 120 voitures par heure à leur drive, ce qui donne plus de 17.000 bagnoles par jour, sur l’axe principal de Dolus : on a fait des simulations, ça ne rentre pas. Ensuite, il veulent supprimer un gros fossé qui est au bord de leur terrain, une “noue”, qui sert à évacuer l’eau de toute cette zone commerciale articifialisée. On ne peut pas cautionner ça. » (...)

Situé à peu près au milieu de l’île, près d’une zone commerciale fréquentée, l’emplacement promet de juteux profits pour le vendeur de hamburgers, s’il parvenait à s’installer. Bloqué dans son projet, il a décidé de poursuivre la commune devant la justice, contestant les motifs de rejet de ses permis de construire. (...)

Fin septembre, le tribunal administratif de Poitiers s’est prononcé en sa faveur, enjoignant Dolus à accorder le permis dans un délai d’un mois. Sans quoi la commune devrait payer une astreinte : 300 € par jour de retard. Elle a fait appel, et demandé un sursis à exécution de la peine. Car, pour l’instant, Grégory Gendre n’entend pas lâcher : le tribunal « ne s’est pas prononcé sur la totalité de nos arguments », estime-t-il.

En attendant, la mairie a provisionné les sommes qu’elle risque de devoir payer (130.000 € pour une année entière), tout en faisant appel aux citoyens pour éviter de puiser dans les fonds publics. Une association a été constituée pour cela (...)

« Je ne pensais pas que ce sujet deviendrait aussi important. Nous avons reçu des dons de toute la France, des “citoyens solidaires et reconnaissants” qui nous écrivent “tenez bon” », raconte-t-il en montrant la pile de lettres et mails reçus. Le nouvel objectif : trouver 900 personnes donnant chacune 10 € par mois, de manière à assurer le provisionnement des astreintes jusqu’au jugement en appel (aucune date d’audience n’a encore été fixée).

Bien sûr, l’acharnement du maire fait des mécontents. Depuis plusieurs semaines, un collectif « pour l’ouverture du McDonald’s » s’est lancé sur les réseaux sociaux. (...)