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La France va-t-elle abolir l’esclavage pour les Grecs ?
Article mis en ligne le 10 juin 2015

François Hollande a inauguré en mai 2015 le musée de l’esclavage en Guadeloupe. L’esclavage est reconnu depuis 2001, en tant que crime contre l’humanité. Aujourd’hui des hommes sont traités en esclaves, exploités par des maffias, par des sous-traitants de sous-traitants, par des actionnaires obnubilés par le rendement de leurs placements, par les consommateurs qui veulent ignorer le pourquoi du prix si bas de leurs achats. (Texte de Denis Dupré et de Panagiótis Grigoríou publié par “Le Huffington Post”, le 10 juin).

Un esclave n’est qu’un outil de production et il ne pourra jamais disposer du fruit de son travail. Les esclaves ne le deviennent peut-être plus à cause de leur peau ou leur nationalité mais ils y sont réduits pour assurer leur survie et celle de leurs proches, pour payer leurs dettes...

Ce sont aussi des états entiers qui peuvent être asservis pour satisfaire leurs créanciers. Certains pays du tiers-monde, après avoir été endettés avec la complicité de dirigeants corrompus, ont été pillés et l’Europe a bénéficié d’une part du butin. Ironie de l’histoire, c’est maintenant le tour de certains états européens.(...)

La dépossession par les créanciers des biens communs du peuple grec est des plus brutales. Une fois, leurs entreprises publiques, ports et aéroports, terres et immeubles devenus propriétés de fonds de gestion internationaux et de banques, l’esclavage est assuré pour les grecs et leurs descendants. Cela ne suffira même pas à payer leur dette.

Il n’est pas question ici de nier les responsabilités des grecs. Mais, la France, disposée au repentir face aux exactions, faites en son nom dans le passé, est-elle lucide sur sa responsabilité au niveau européen qui mène à l’asservissement sans avenir des grecs ? D’autres postures seraient possibles, pour des raisons morales, ou ne serait-ce même que par égoïsme bien compris.

François Hollande s’est positionné pendant sa campagne contre les ravages de l’extrême-libéralisme. Mais quelles valeurs fondent véritablement l’orientation de la politique de son gouvernement ? De quelle façon les plus faibles sont-ils protégés par les plus forts ?(...)

Le Décret de 1848, toujours en vigueur, abolit définitivement l’esclavage et toute participation indirecte à l’exploitation. Son article 8 stipule : "Même en pays étranger, il est interdit à tout Français de posséder, d’acheter ou de vendre des esclaves, et de participer, soit directement, soit indirectement, à tout trafic ou exploitation de ce genre. Toute infraction à ces dispositions, entraînera la perte de la qualité de citoyen français."

La France laïque, la France des droits de l’homme applique-t-elle la loi de 1848 à ses dirigeants qui, en son nom, exigent des grecs la poursuite sans fin de leurs efforts ?

L’applique-t-elle vis-à-vis des inflexibles détenteurs de créances ?

Le plus vieux texte de loi du monde, le code du roi Hammourabi, énonçait clairement des limites pour empêcher les créanciers, par l’appropriation d’esclaves, de devenir des petits seigneurs, concurrents du pouvoir.(...)

Le créancier France, suiveur de l’Allemagne, semble vouloir priver les grecs de leurs biens communs et leurs outils de travail et cela pour une durée indéterminée. Car il faut bien l’admettre, la dette des grecs n’est pas remboursable.

Au-dela du cas grec, les dettes mondiales ne peuvent être remboursées(...)

Trois années de production de richesses mondiales pour rembourser les dettes, est-ce raisonnable ? D’autant que, comme l’a montré Piketty, les débiteurs possèdent peu de richesses, et rarement leur outil de travail.

Alors, la France a-t-elle intérêt à soutenir ceux qui s’enrichissent aujourd’hui aux dépends de l’autonomie de la Grèce ?(...)

La France, complice et responsable de l’esclavage des grecs en sera victime à son tour. Les Français ne devraient pas se laisser bercer par des illusions. Et, ne serait-ce que par intérêt, ils ne devraient laisser faire aux autres, ce qu’ils ne veulent pas avoir à subir.

Il convient d’ajouter, non sans amertume, que les marchés et ses algorithmes s’est peut-être définitivement emparé du réel, le conduisant au bord du chaos. Ce chaos, que nous observons sans réaction adaptée pour l’instant, semble précédé par la fin voulue des régimes démocratiques du monde occidental(...)

Il est peut-être encore temps pour notre président, qui ne peut que méditer sur les leçons de l’histoire de l’humanité, comme celle dont témoigne ce musée de l’esclavage, d’assumer son rôle historique de sauver la Grèce puis la France de la servitude programmée
(...)