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L’Humanité
La fève du Vanuatu, pépite du monde
Article mis en ligne le 10 novembre 2017

Un petit producteur de cet archipel pauvre d’Océanie vient de voir classer son cacao parmi les meilleurs crus grâce aux principes du commerce équitable

C’est un chapelet d’îles presque oublié. Une goutte d’eau, en tout cas, dans l’océan du marché du chocolat. Et pourtant, Moli Lui, petit producteur de la République du Vanuatu, vient de voir classer ses fèves parmi les 50 meilleures au monde par le jury du prix international du cacao, décerné le 30 octobre à Paris à l’occasion du Salon du chocolat. Sa cabosse à lui étend ses racines dans les eaux cristallines de l’île de Malo, un petit caillou volcanique posé sur la mer, en plein milieu des 80 bouts de terre qui forment cet archipel du sud-ouest de l’océan Pacifique. Là-bas, en Océanie, à quelque deux mille kilomètres de l’Australie, le cacao fait partie des activités traditionnelles, à côté de la pêche de subsistance et de l’agriculture. (...)

Le cacao est une denrée de commerce très spéculative

Le cacao est une denrée de commerce très spéculatif. Produit au Sud, consommé au Nord, c’est le cours mondial qui en détermine le prix, dont le montant échappe aux producteurs. Alors que la somme annuelle des échanges est estimée à 10 milliards de dollars, les grandes industries agroalimentaires achètent les fèves à prix dérisoire. Artisans du monde, une des principales associations de commerce équitable, a ainsi calculé que, pour une tablette de 100 grammes achetée en supermarché, il ne revient au producteur que 6 % du prix payé par le consommateur. Avant, Moli Lui vendait lui aussi ses fèves en vrac, au prix imposé du marché. Les fruits partaient pour Singapour, puis la Malaisie, dans la broyeuse du commerce mondial. La petite exploitation familiale, qui perdurait depuis trois générations, aurait pu ne pas survivre à un tel traitement. Des trois champs d’arbres légués après le décès des parents, un seul est resté debout, celui de Moli, qui a poursuivi l’aventure sans conviction, otage d’un « marché pas intéressant », ramassant des fèves au goût amer de la pauvreté. Le Vanuatu, ancienne colonie partagée entre la France et le Royaume-Uni, est un des pays les plus pauvres au monde, bien qu’il soit connu pour être un paradis fiscal. Nombre de ses îles sont menacées d’engloutissement par la montée des eaux due au réchauffement climatique. Le pays fait d’ailleurs partie du groupe de petits pays insulaires qui luttent au sein des sommets de l’ONU pour limiter la hausse du thermomètre à 1,5°C. Les plages de rêve, édens pour les touristes, masquent mal une économie où la subsistance reste une préoccupation quotidienne. Le troc domine encore dans les échanges. Financer l’accès à l’éducation des enfants reste un casse-tête de tous les jours. L’archipel, qui croise la route des tempêtes tropicales, fut dévasté en 2015 par le cyclone Pam. Les dégâts furent tels que la production de cacao connut cette année-là une chute vertigineuse. Il a fallu reconstruire. Et pour certains, saisir l’occasion d’impulser la mise en place d’une filière de qualité et durable. « Nous avons construit une chocolaterie artisanale pour développer une industrie de transformation locale », explique Sandrine Wallez, présidente d’Activ. En Australie, Oxfam se charge de distribuer les plaquettes de chocolat au sein d’un réseau de magasins. (...)