
C’est un remake de 2020. Lors de l’examen du précédent projet de réforme des retraites à l’Assemblée nationale, les chefferies éditoriales amplifiaient le « tonnerre » de l’hémicycle en imputant « l’obstruction » des débats à la seule gauche parlementaire. Déjà, l’information se résumait, pour l’essentiel, à placarder le nombre d’amendements déposés par les députés LFI. À monter bout à bout leurs « pires coups de gueule ». À les sommer de ne pas « entraver » le cours de la « bonne » démocratie.
Quatre ans plus tard, les médias dominants agissent toujours sur le débat démocratique tels une loupe déformante. Bien sûr, du « chahut » a lieu. Bien sûr, des invectives sont échangées. Bien sûr, les débats sont mouvementés. Mais le compte rendu médiatique du processus parlementaire a ceci de profondément dé(sin)formant qu’il sélectionne, hiérarchise et amplifie certains faits au service d’un cadrage éditorial établi, manifeste dans la plupart des médias : faire le procès d’une gauche politique « irresponsable ».
Comme de coutume, ce type de traitement répond en tous points aux exigences commerciales des médias en quête de buzz... et de fracas, tout en prétendant le déplorer. (...)
Un bon exemple de la faillite de ce journalisme politique : Le Parisien. Entre le 30 janvier – date d’entrée de la réforme en commission des Affaires sociales – et le 17 février – arrêt des échanges dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale –, le lecteur ne trouvera rien de consistant sur les argumentaires avancés par les parlementaires de gauche. En revanche, il ne saura que faire de l’avalanche d’articles consacrés aux stratégies des différentes chapelles politiques, ainsi qu’au « tapage » (7/02) et autres « coups de chaud » (17/02) dans l’hémicycle. Bref, au « spectacle affligeant » de la « pagaille à l’Assemblée » (13/02), dont se délecte... la rédaction. La gauche est, systématiquement, la principale force politique dans le viseur. (...)
« On est entre le camp de gitans, le camp de guignol, enfin ce qu’on veut, mais c’est quelque chose qui, de toute façon, tire tout le débat démocratique et le débat politique vers le bas » expliquait Anna Cabana sur BFM-TV (13/02), reprenant les termes du sénateur UDI Hervé Marseille. Le débat médiatique vole-t-il vraiment plus haut que le débat politique ?