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La grande aventure de l’uranium en Limousin
1948 - 2018 : 70 ans d’uranium en Limousin
Article mis en ligne le 4 janvier 2018

L’exploitation par le commissariat à l’énergie atomique (CEA) des ressources en uranium enfermées dans les massifs de granit limousins va, dès sa découverte en 1948, bouleverser la vie de nombreux habitants de la région. La filière emploie jusqu’à plus de 2.000 personnes !

Jusqu’en 2001, le minerai limousin enrichit l’économie locale et alimente le complexe nucléaire français, incarné par la Cogema. Plus de 30.000 tonnes d’uranium sortent du sous-sol des trois départements. L’épuisement des filons, la crise du nucléaire et l’éveil de la conscience environnementale ont raison des mines limousines. Il ne reste aujourd’hui qu’un peu plus de 140 personnes employées dans la région par Areva (ex-Cogema). L’enjeu local est désormais la gestion des vestiges industriels et radioactifs, héritage d’un demi-siècle d’exploitation de l’uranium en Limousin.

1948. La nouvelle tombe et va bientôt faire le tour du monde : un gisement d’uranium a été découvert à Saint-Sylvestre, en Haute-Vienne ! À Paris, c’est l’euphorie dans les bureaux du commissariat à l’énergie atomique (CEA), qui cherche depuis trois ans de quoi alimenter la filière nucléaire française naissante. L’échantillon de pechblende ramassé au milieu des bois, à quinze minutes au nord de Limoges, est l’une des premières pierres de l’aventure de plus d’un demi-siècle entre l’épopée nucléaire française et le Limousin. (...)

À partir des années 1970, les questions de santé et d’environnement deviennent centrales dans la gestion des activités minières par la Cogema, notamment dans son rapport aux populations locales et à leurs représentants.

Déjà la pollution sonore avait poussé les habitants de Fanay, sur la commune de Saint-Sylvestre, à signer une pétition que le maire et le conseiller général portent à la direction du CEA en juillet 1963. Mais l’affaire ne fait pas plus de bruit que cela et une solution est trouvée sans que le préfet ne soit invité à prendre part au débat... (...)

Des associations, de riverains gênés ou d’amis de la nature, se forment un peu partout sur l’emprise de la division minière. Réunions d’information, pétitions, mobilisations diverses, concerts… La colère monte au fil des découvertes des militants et des fins de non-recevoir qu’adresse la Cogema (ex-CEA) à ceux qu’elle considère comme « pas sérieux ».

En novembre 1976, un attentat à la bombe détruit les compresseurs et le pupitre de commande du puits de Margnac. Une mystérieuse organisation, le Copeau (Commando d’opposition par l’explosif à l’autodestruction de l’Univers, NDLR), revendique l’action. On n’en entendra plus jamais parler…

À la colère de quelques « baba-cools récemment installés », comme les désignent certains défenseurs de la Cogema et de l’emploi, s’ajoutent bientôt celle d’élus locaux et d’agriculteurs excédés. (...)

D’une crise à l’autre, l’inéluctable déclin

À partir de 1955 et jusqu’à la fin des années 60, l’industrie minière de l’uranium connaît un véritable âge d’or. La doctrine de l’indépendance énergétique française fait du minerai limousin un symbole, conférant à ses géologues, ses mineurs et ses chimistes de bons salaires et le statut de héros. Pourtant l’avenir s’assombrit et les alertes se multiplient… (...)

2001. L’aube du troisième millénaire marque la fin de l’extraction de l’uranium en Limousin. Pour autant, l’histoire ne s’arrête pas là… Et, comme pour mieux aborder cette ère de l’après-mines, Cogema change de nom et devient Areva quelques mois après la fermeture de la mine de Jouac, dernière mine d’uranium de France.

Areva mène, depuis 1990 et surtout depuis 2001, une campagne de dépollution et de réaménagement de ses anciens sites miniers. (...)

Inventaire, surveillance, valorisation,… Sur le terrain, Areva détient encore trois concessions et est responsable de la sécurité et du suivi radiologique de dizaines de zones réparties autour des anciens sites miniers. Car le risque le plus immédiat n’est pas forcément d’être irradié… Des grillages – parfois éventrés - entourent les emprises présentant encore des risques et quelques panneaux – pas toujours lisibles - en interdisent l’accès aux promeneurs. (...)

Deux des anciennes mines à ciel ouvert limousines, dont Bellezanne, servent aujourd’hui à stocker les déchets issus d’un demi-siècle d’extraction et de traitement de l’uranium en Limousin : déjà un million et demi de tonnes ont été versées dans les fosses. Les boues radioactives (« sans risque sanitaire », selon une expertise demandée en 1998 par le conseil général, NDLR) du lac de Saint-Pardoux, résultat du « rinçage » des anciens réseaux miniers situés tout autour et du curage de l’embouchure du ruisseau, s’y trouvent également. Ces « stériles », ou « déchets radioactifs » comme le soulignent les associations de défense de l’environnement, ont donné lieu à de longs débats.(...)

À ce jour en Haute-Vienne, 141 personnes travaillent pour Areva, essentiellement sur Bessines*. Le groupe (dont les capitaux sont publics à 92 %, NDLR) est confronté ces dernières années à de graves difficultés financières et judiciaires. Et s’il n’envisage pas d’extraire à nouveau de l’uranium des concessions locales, l’héritier du CEA et de la Cogema garantit son maintien dans la région : « au vu des projets en cours de création d’une nouvelle installation pour le CIM (centre d’innovation minière, NDLR) et une unité de stockage des boues issues des anciennes mines, les activités vont être pérennisées dans le Limousin ».