
Parmi tous les médias qui ont couvert la campagne de bombardements dirigée par l’Arabie saoudite au Yémen ces derniers jours, rares sont ceux qui ont pris le temps de se poser une question fondamentale : cette guerre est-elle légale ?
Il y a plus d’une semaine, une coalition de pays menée par l’Arabie saoudite a commencé à bombarder le Yémen pour chasser un groupe rebelle soutenu par l’Iran qui a pris le contrôle de Sana’a, la capitale du Yémen, à la fin de l’année dernière. Les bombardements ont fait des centaines de morts, dont de nombreux civils.
L’Arabie a prétexté que ces attaques étaient une manière de venir en aide à son voisin sur une demande exprès de son dirigeant, ce qui est légal en vertu du droit international.
Le président yéménite Abdu Rabu Mansour Hadi avait en effet demandé une intervention, car son régime était menacé par les rebelles du mouvement houthiste.
Mais M. Hadi a dépassé la durée de son mandat, il a déjà démissionné et il a même quitté le pays. Selon les experts, sa légitimité est donc discutable et la légalité de l’opération militaire de l’Arabie saoudite n’est donc pas évidente.
Pour certains observateurs, ce n’est que la dernière d’une liste de plus en plus longue d’opérations militaires qui échappent à toute surveillance, malgré un nombre élevé de victimes civiles.
Un cas à part
Les exemples de gouvernements demandant du soutien pour une opération militaire sur leur territoire ne manquent pas. L’Irak a ainsi récemment demandé l’aide des États-Unis pour combattre le groupe autoproclamé État islamique. Le droit international considère ce genre d’intervention comme légal.
Mais le cas du Yémen est moins évident. M. Hadi avait depuis longtemps perdu le contrôle de grandes parties de son pays. Les rebelles houthistes — un courant zaïdiste du nord, qui s’opposait de manière récurrente au gouvernement depuis des années — s’étaient emparés de Sana’a en septembre et une grande partie de l’armée n’obéissait plus à M. Hadi.
Le mandat démocratique de M. Hadi n’était pas non plus très solide. Il avait gagné les élections de 2012, auxquelles il était le seul à se présenter après les manifestations du printemps arabe qui avaient entraîné la chute d’Ali Abdullah Saleh, au pouvoir depuis de longues années. Son mandat devait se terminer par des élections véritablement démocratiques en février 2014, mais il avait été prolongé d’un an sans scrutin.
En janvier, M. Hadi avait annoncé sa démission avant même la fin officielle de son mandat, lorsque les houthistes s’étaient emparés du palais présidentiel.
Après avoir fui Sana’a pour se réfugier dans la ville portuaire d’Aden, il était revenu sur son annonce, affirmant qu’elle avait été prononcée sous la contrainte. Puis, peu après avoir appelé à une opération militaire, il a quitté le pays et s’est installé en Arabie saoudite, où il demeure encore à l’heure actuelle.
Peut-on alors dire qu’il avait le pouvoir de demander une telle intervention ?
Qui a le pouvoir ? (...)
Si la justification légale de la guerre peut être débattue, la responsabilité des parties prenantes en matière de protection des civils est indiscutable.
Là aussi la coalition dirigée par l’Arabie saoudite se heurte à des allégations d’illégalité.
Selon plusieurs juristes interrogés par IRIN, le droit humanitaire international pourrait avoir été violé. (...)