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Basta !
La plus grande mine de charbon à ciel ouvert du monde maltraite les communautés locales
Article mis en ligne le 12 novembre 2015

Carmeñis se souviendra longtemps du jour où elle a été expulsée manu militari de la petite maison où elle vivait à Tobacco, un village situé au nord-est de la Colombie. Son tort ? Avoir refusé de vendre son bien à El Cerrejón, la compagnie minière qui exploite les abondants gisements de charbon de la région. Après l’expulsion des derniers résistants, le village de Carmeñis a été entièrement détruit. C’était en août 2001. La journée a été si violente que la femme a fait une fausse couche [1]. C’est à ce prix qu’El Cerrejón étend peu à peu son territoire d’exploration... (...)

Du charbon destiné à l’Europe

En 2000, les multinationales Anglo American, BHP Billiton et Glencore rachètent Carbocol. Deux ans plus tard, elles font main basse sur Intercor, devenant alors les seules propriétaires du site minier. Anglo American fait partie des leaders mondiaux de l’extraction du charbon, qu’elle exploite aussi en Australie, en Afrique du Sud et au Canada. Les réserves qu’elles détient représentent 13,5 milliards de tonnes de carbone qui seraient émises dans l’atmosphère si elles étaient extraites et brûlées. Sur le site colombien, 32 millions de tonnes de charbon sortent de terre chaque année, dont plus de la moitié part alimenter des centrales thermiques européennes (Danemark, Irlande, Finlande, Espagne). Mais les dirigeants aimeraient passer à 40, voire 50 millions de tonnes. Il faut donc agrandir, toujours. Et déloger, à nouveau, les populations locales. (...)

Un litre d’eau potable par personne et par jour !

C’est que l’exploitation du charbon consomme de l’eau, beaucoup d’eau ! 70 millions de litres sont absorbés, chaque jour, par le site minier. Imbibés de poussières de silice, particules fines et autres produits chimiques, les cours d’eau, en plus de se tarir, sont exsangues. À tel point que les habitants sont rationnés en eau potable : la compagnie minière leur donne à peine un litre par personne et par jour. Mais bien souvent, les habitants achètent l’eau en bouteille, parce que celle que leur fournit El Cerrejón est de très mauvaise qualité : « tout juste bonne à faire la lessive », témoignent des habitants. Selon eux, de très nombreux enfants sont morts à cause de la malnutrition et du manque d’hygiène qu’entraîne le manque d’eau.

Déjà terrible, la situation pourrait empirer si les nouveaux projets d’agrandissements d’El Cerrejón étaient menés à leur terme. (...)

Viols, menaces de mort et meurtres

La violence de la mine, c’est aussi le développement de la corruption, qui gangrène toute la région ; l’augmentation des meurtres ; et un accroissement des viols de femmes et de jeunes filles. L’insécurité est permanente, malgré la forte militarisation de la zone et l’augmentation continue de la présence policière. Luttant contre la peur, la faim et la maladie, certaines personnes trouvent la force de résister à l’expansion permanente de la mine. Certains demandent carrément sa fermeture. Et sont en conséquence sans cesse harcelés. En mai 2015, une jeune fille de 15 ans, dont la mère est très impliquée dans les mouvements de lutte, a été menacée de mort. De nombreux militants ont été blessés par des tirs des forces armées lors de mouvements de protestations. D’autres ont été tués [4].

Les victimes de ces violences n’ont jamais entendu parler de la toute récente Charte des droits humains, dont se vante l’entreprise. (...)

Les propriétaires de la mine – Anglo American, BHP Billiton et Glencore – se sont construit cette image très lisse pour obtenir l’approbation de leur projet d’agrandissement. Aux antipodes de la réalité du terrain. C’est pourquoi les Amis de la terre, et leurs partenaires ont nominé Anglo American au Prix Pinocchio. Les votes sont ouverts jusqu’au 2 décembre.